Point de vue de Bernard Wach

.  Oui, il faut plutôt penser Europe et parlement européen que gilets jaunes et extrême-droite repoussoir.

Oui l’Ă©cologie est le grand mouvement de gauche, tournĂ© vers le futur, mĂŞme avec ses erreurs parfois graves, dont une bonne dose d’antiscience. Elle reste la seule critique des dĂ©rives industrielles majeures et cela depuis le dĂ©but et toujours : amiante, aĂ©rosols, pesticides, rĂ©chauffement climatique, malbouffe, gaspillages, transports polluants, dĂ©chets et risques nuclĂ©aires, sauvegarde de la biodiversitĂ©… Les autres courants se sont trop longtemps accommodĂ©s des pollutions industrielles pour toutes les raisons possibles, progressisme bĂ©at, ou la tĂŞte dans le guidon avec toujours d’autres prioritĂ© : la croissance, la consommation effrĂ©nĂ©e comme Ă©teignoir des mouvements sociaux, la dĂ©fense de l’emploi, les Ă©goĂŻsmes sectoriels… Tous les scientifiques auraient leur mot Ă  dire et bien des explications Ă  fournir s’ils ne se braquaient pas, car les solutions ne viendront pas d’un coup de baguette magique, d’une dĂ©croissance brutale, d’un renoncement Ă  tout confort et toute libertĂ© de mouvement. Ce sera un long effort, avec de nouveaux progrès sur les Ă©nergies, les modes de production et de transport, Ă©galement une gestion sociale qui ne dĂ©stabilise pas nos sociĂ©tĂ©s. C’est pourquoi, me semble-t-il, l’argument de l’urgence absolue est intenable et cela mĂŞme si en attendant, de gros dĂ©gâts sont prĂ©visibles.

 

Sur le vote PS aujourd’hui, je n’en comprends pas l’attrait, pourtant j’ai presque toujours votĂ© PS. Certainement la social-dĂ©mocratie n’a jamais fait grand mal : pas de risque d’attaque frontale sur les services publics, les aides sociales, l’enseignement, la recherche scientifique, et pas plus sur les autres fonctions rĂ©galiennes police et armĂ©e; des formules rĂ©volutionnaires mais un libĂ©ralisme cachĂ© qui ne pĂ©nalisait pas trop l’Ă©conomie; une immigration zĂ©ro affichĂ©e et le contrĂ´le de l’immigration mais un certain laxisme bienvenu, humanitĂ© oblige. Une sorte de bonne volontĂ© gĂ©nĂ©rale avec des Ă©quilibres maintenus, une gestion de père de famille non-violente. Ce n’est pas si mal, mais aucune vraie ambition depuis la grande rĂ©forme des 35h : on est des gentils et on fait ce qu’on peut. In fine un Ă©chec cuisant Ă  l’Ă©cole, l’universitĂ© qui boĂ®te, la prolĂ©tarisation des fonctionnaires, la dĂ©gradation lente de l’hĂ´pital, l’absence de politique du logement pourtant essentielle pour le niveau de vie, Ă  laquelle on a prĂ©fĂ©rĂ© une politique de la ville, peu efficace et seule politique d’insertion de l’immigration, Ă©chec lĂ  aussi. Et puis la dette creusĂ©e, des inĂ©galitĂ©s accrues comme partout mais un peu moins, peu de dynamisme Ă©conomique et industriel, pas de remède au chĂ´mage, pas de profond engagement et mĂŞme un certain fatalisme sur l’Europe, et un recul immĂ©diat sur la taxe carbone contre les bonnets rouges. Tout cela est au mieux mĂ©diocre, et ça ne passait plus.

 

Je partage l’attente d’une recomposition de la gauche mais elle n’est pas pour tout de suite et si elle devait advenir, ne serait-ce pas autour de la gauche macroniste, comme hier autour de la Gauche DĂ©mocratique de Mitterrand, avec les Ă©cologistes et le PS, peut-ĂŞtre le PC ? L’erreur fatale de RaphaĂ«l GlĂĽcksmann, c’est d’avoir voulu simplement raccrocher les wagons, en nostalgique de la gauche telle qu’elle Ă©tait, avec ses bons sentiments, avec ses productivistes et ses Ă©cologistes, un discours anti-libĂ©ral dĂ©passĂ© et une gauche socialiste, voire une extrĂŞme-gauche qui a pourri le PS depuis des annĂ©es. In fine, il se retrouve seul avec le PS, ce n’est peut-ĂŞtre pas plus mal.

 

Les forces militantes en prĂ©sence dans la sociĂ©tĂ© française sont l’Ă©cologie, le fĂ©minisme, le mouvement homosexuel, le meilleurs et le pire du syndicalisme, l’extrĂŞme-gauche intarissable, le catholicisme conservateur, l’extrĂŞme-droite identitaire, le salafisme et l’antiracisme racialisĂ© des banlieues. La gauche en tant que telle est absente et le choix parmi ce qui reste de forces vives est vite fait mais pour l’instant, ne porte pas une recomposition de la gauche.

Je voterai Macron pour plusieurs raisons :

– Macron est de loin le plus europĂ©en avec une bonne comprĂ©hension de l’Europe qui doit prendre sa place dans le monde Ă  hauteur de sa puissance rĂ©elle, pas plus, pas moins, et qui est la seule solution face aux dĂ©fis Ă©cologiques, Ă©conomiques, sociaux et gĂ©opolitiques.

– LREM est la seule composante proposant une rĂ©elle dynamique en France et en Europe, versant certes technocratique mais rappelons-nous, la deuxième gauche Ă©tait autogestionnaire et technocratique. Les rĂ©sultats sont dĂ©jĂ  lĂ . En passant, Macron reprend l’idĂ©e d’une participation des salariĂ©s aux conseils d’administration des entreprises qui m’a toujours paru essentielle. Il n’est pas vrai que les salariĂ©s sont moins investis dans l’entreprise que ne le sont les capitalistes.

– Macron a montrĂ© qu’il entendait la sociĂ©tĂ© aussi bien la sensibilitĂ© Ă©cologique que les gilets jaunes. Convaincu ou pas sur le fond, c’est un pragmatique et dans la situation actuelle, confuse, il faut s’avoir s’adapter.

– Les gilets jaunes et leurs sympathisants ont gagnĂ© mais ils sont dopĂ©s aux endomorphines de la fièvre rĂ©volutionnaire. Comme nous autres, gauchistes hier, il leur faut manger leur chapeau, le plus vite sera le mieux afin qu’on s’occupe d’autre chose. Une victoire de LREM aux europĂ©ennes les y aiderait.

Cela dit, je ne suis pas sectaire car je crois moins Ă  la menace brune en France et en Europe, au-delĂ  des points d’appuis qu’elle a dĂ©jĂ  acquis dans les maillons faibles du continent; cela tant que les insiders, certains disent les bobos, plutĂ´t bien dans leur peau, dĂ©mocrates, tolĂ©rants, ouverts au monde, anti-racistes sont majoritaires. Il faudrait dĂ©velopper ce point mais sur cette base, nul besoin de faire barrage : quoique nous votions, en europĂ©ens convaincus, nos Ă©lus se retrouveront ensemble au parlement europĂ©en.

Au sujet de Initiative Citoyens en Europe

ICE (Initiative Citoyens en Europe) est une association, née en 1989. Elle est, à l’origine, le produit de l’adhésion d’hommes et de femmes libres qui ne conçoivent pas de vivre en Europe sans tisser des liens de solidarité élémentaires entre européens.

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