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Selon la dernière étude menée par le Comité International des Femmes Dirigeantes (CWDI), la France est aujourd’hui devant les États-Unis et les autres pays d’Europe en matière de féminisation des conseils d’administration et ceci sur un panel de 200 plus grandes entreprises dans le monde. Suite à cette loi, les femmes représentent aujourd’hui 29,7 % des administrateurs des grandes entreprises de France, tandis que les États-Unis atteignent un record national de 22,5 %.

« La France est aujourd’hui un exemple pour de nombreux pays soucieux de développer la place des femmes dans les instances dirigeantes », se réjouit Irène Natividad, Présidente du groupe de recherche international CWDI, établi à Washington. « L’augmentation spectaculaire du nombre de femmes siégeant dans les conseils d’administration des entreprises françaises prouve qu’il est possible d’accélérer le mouvement dès lors que la volonté est là. »

Dans l’ensemble des sociétés du classement Fortune Global 200, ce taux de féminisation s’élève seulement à 17,3 %.

Cette augmentation est la conséquence directe de la loi sur la parité votée en 2010 qui, en France comme dans d’autres états de l’Union Européenne, imposent aux entreprises de porter à 30-40 % la proportion de femmes dans leurs instances dirigeantes. La Norvège, qui a fait œuvre de pionnier en légiférant dès 2008 et en parvenant à atteindre très rapidement un taux de 40 % de femmes siégeant en conseil d’administration, a depuis été rejointe par l’Espagne, les Pays-Bas, l’Islande, l’Italie et la Belgique. Le phénomène ne se confine pas à l’Europe, puisque la Malaisie a décidé elle aussi d’instaurer des quotas, qui entreront en vigueur à l’horizon 2016. En comptant les 16 autres pays qui ont voté en faveur de quotas de femmes dans les conseils d’administration d’entreprises publiques, ce sont désormais 22 états qui recourent à cette politique. Dans cette même tendance, l’Inde (pour les sociétés cotées en bourse) et les Émirats Arabes Unis (pour les entreprises nationalisées) ont récemment promulgué des lois imposant la présence d’au moins une femme par conseil d’administration.

Cette féminisation des conseils d’administration a par ailleurs été stimulée par l’intégration d’obligations de parité ou de diversité dans le code de gouvernance d’entreprise de plusieurs pays d’Europe – une initiative qui, depuis, a fait des émules sur d’autres continents. Cette stratégie a d’ores et déjà su séduire 24 pays réticents à l’idée d’instaurer des quotas. En Australie, les obligations imposées aux sociétés cotées en bourse ont favorisé l’augmentation du taux de féminisation des conseils d’administration des sociétés de l’ASX 200. Ce taux est passé en dix ans de 8,6 % à 18,1 %, sans qu’il soit nécessaire d’instaurer une politique de quotas.

Parmi les sociétés figurant dans le classement Fortune Global 200 passées en revue dans l’étude réalisée par le CWDI en 2014, on note que celles établies dans des pays ayant opté pour la stratégie des quotas présentent un taux de féminisation supérieur (24,3 %) à la moyenne des entreprises opérant dans un secteur comparable (17,3 %). Les deux pays affichant la plus forte progression depuis 2004, date à laquelle le CWDI a commencé à consigner la représentativité des femmes dans les conseils d’administration des sociétés du Fortune Global 200, ont tous deux adopté des quotas. Il s’agit de la France (passée d’un taux de 7,2 % à 29,7 %) et de l’Italie (de 1,8 % à 25,8 %).
De même, on relève que, parmi les sociétés figurant dans le classement Fortune, celles opérant dans des pays où les entreprises sont incitées à favoriser la parité affichent un taux de féminisation supérieur (23,2 %) à celui de sociétés dont le code de gouvernance d’entreprise est dépourvu de ce type de recommandation.

« Les quotas fonctionnent », explique Mme Natividad. « De même, l’inclusion de la notion de diversité des sexes dans les codes de gouvernance d’entreprise a fait ses preuves. En revanche, il serait contre- productif de penser que les femmes peuvent accéder naturellement à des postes d’administrateurs et d’attendre que les choses se fassent d’elles-mêmes ». Les trois économies les plus puissantes du monde – États-Unis, Chine et Japon – sont aussi celles qui affichent les plus faibles hausses de la part de femmes représentées au sein des conseils d’administration. À elles trois, ces nations détiennent plus de la moitié des 200 plus grandes entreprises de la planète. Pourtant, aucune n’a adopté de stratégie proactive pour améliorer, à l’échelle nationale, la féminisation des conseils d’administration. Si elles venaient à le faire, la part de femmes siégeant dans les instances dirigeantes des entreprises du classement Fortune augmenterait considérablement.

Le Top 10 (Top 25 en réalité, du fait de la présence de nombreux ex aequo) de meilleurs élèves en matière de parité est dominé par les enseignes américaines et françaises. Tandis qu’en 2004, les États- Unis pouvaient s’enorgueillir de placer 20 noms sur les 27 du classement, seules 8 entreprises américaines subsistent dans le Top 10 de 2014, qui accueille par ailleurs 7 sociétés françaises. Pour la première fois en dix ans, l’Italie propulse trois sociétés au sein du Top – Generali, Enel et Eni -, lesquelles dénombrent toutes plus de 30 % de femmes dans leur conseil d’administration. Une décennie plus tôt, personne n’aurait pu concevoir qu’une entreprise transalpine puisse un jour passer pour un modèle de parité. Il aura fallu que la loi instaure des quotas pour que le changement se produise.

Il convient également de souligner que la composition du classement Fortune Global 200 a sensiblement évolué en l’espace de 10 ans. En 2014, près du quart des sociétés considérées comme les plus influentes au monde sont issues de pays émergents, la Chine en tête. Du fait de la place de la femme dans la société et la tradition asiatique, ces pays affichent la plus faible part de femmes siégeant dans les instances dirigeantes, plombant quelque peu des résultats qui auraient pu être meilleurs au vu des progrès réalisés par les pays d’Europe. Les entreprises issues de ce region économique ont mis un terme à l’hégémonie des entreprises américaines dans le classement Fortune Global 200, lesquelles sont passées de 78 à 58 en l’espace de dix ans.

À propos du CWDI :

Le Comité International des Femmes Dirigeantes (Corporate Women Directors International ou CWDI) s’attèle à promouvoir la représentation des femmes dans les conseils d’administration des entreprises du monde entier, à développer des réseaux afin de rapprocher les femmes d’affaires à l’échelle nationale comme internationale et aspire à affiner les compétences des administrateurs en matière de gouvernance d’entreprise. Désireux de fournir des indicateurs permettant de mesurer l’évolution de la place de la femme dans les conseils d’administration, le CWDI réalise des enquêtes internationales depuis 1996 afin d’identifier les femmes siégeant dans les instances dirigeantes des entreprises australiennes, canadiennes, japonaises, sud- africaines, espagnoles et américaines. L’organisation publie également des rapports régionaux et mondiaux consacrés aux grandes entreprises de la planète et à la diversité des sexes dans leurs conseils d’administration. Le CWDI a par ailleurs réalisé plusieurs enquêtes sectorielles, qui ont donné lieu à 22 rapports en 17 ans.

En outre, le CWDI organise autour de la thématique de la gouvernance d’entreprise des tables rondes qui réunissent des administratrices et dirigeantes du monde entier. Le dernier évènement en date a permis de rassembler à la Banque Mondiale de Washington plusieurs femmes d’affaires et d’influence, venues échanger sur les leviers qui permettent de démultiplier les opportunités professionnelles pour les femmes. Pour en savoir plus sur le CWDI ou ses publications, nous vous invitons à
contacter le siège de l’organisation à l’adresse suivante : cwdi@globewomen.com.