Communiqué du collectif du Jeudi noir

Alors que le vote définitif de la loi ALUR a eu lieu le 19 février dernier à l’Assemblée nationale puis au Sénat, le collectif Jeudi Noir en fait le bilan, au terme de presque un an de travail législatif. L’occasion pour le collectif de se remémorer le combat mené depuis sa création en 2006.

La loi ALUR (Accès au logement et un urbanisme rénové ) exprime clairement que la “main invisible” ne doit pas réguler le marché du logement. Si on la laisse faire ce sont les précaires, les mal logés, les jeunes qui se la prennent dans la gueule.

La fin des pires excès

Ce sont d’abord les excès les plus criants des mécanismes de marché qui ont été enfin pris en compte par la loi. Citons notamment:
• Un contrôle réel de l’activité des marchands de listes, qui fera rapidement disparaître les pires margoulins
• La lutte contre les marchands de sommeil avec l’interdiction d’acheter pour les marchands de sommeil condamnés
• La répression des congés frauduleux
• Le renforcement de la trêve hivernale

Un changement de philosophie

Plus généralement, la loi opère un changement de philosophie quant à la relation entre bailleurs et locataires. Jeudi Noir souligne le fait que la loi ALUR est la seule loi depuis 1989 portant des mesures de régulation du parc privé. Ce ne sont plus désormais les seuls mécanismes de l’offre et de la demande qui régissent le logement. Le logement est au contraire considéré comme un besoin fondamental nécessitant une intervention et une régulation étatiques.

Un certain nombre d’avancées peuvent être relevées ::

Garantie Universelle des Loyers (GUL)

Encadrement des loyers sur la base des loyers de voisinage

Transfert de la décision d’expulsion des squatteurs pendant la trêve hivernale du ministère de l’intérieur vers les juges

encadrement des congés

formulaire type pour les baux

allongement de la trève hivernale

Des occasions manquées

Jeudi Noir considère cependant pouvoir relever un certain nombre d’occasions manquées :

D’une part, la loi laisse encore les professionnels de l’immobilier pratiquer une “autorégulation” dont on devine déjà la faible portée. Au terme d’un lobbying forcené, les agents immobiliers ont même réussi à faire perdurer un système injuste et totalement unique en Europe qui fait payer au locataire les services rendus au propriétaire.
Les congés donnés par les bailleurs aux locataires sont également insuffisamment encadrés. La loi aurait pu aller jusqu’à interdire purement et simplement le congé-vente.

Ensuite, et de manière plus générale, Jeudi Noir exprimait au début de la loi le souhait que le statut d’habitation de chacun soit neutre et que la loi accorde à chacun la liberté de choisir son logement. On voit au terme du travail parlementaire qu’il n’en est rien : les parlementaires n’ont pas voulu rendre égaux propriétaires et locataires. Le statut de propriétaire reste un statut supérieur à celui de locataire, qui demeure un statut par défaut, plus précaire et plus cher, y compris fiscalement.

Des décrets qui peuvent tout changer
Au delà de ce que la représentation nationale a déjà acté, Jeudi Noir sait bien que le diable se cache dans les détails et que des décisions fondamentales pour la vie des locataires seront prises lors de la formulation des différents décrets prévus dans la loi ALUR.

Jeudi Noir suit donc d’ores et déjà avec grande attention la teneur des décrets suivants:

décret du Conseil d’Etat sur la justification du complément de loyer exceptionnel

décret du gouvernement sur le calcul des honoraires des agents immobiliers et sur leur plafonnement

Les galériens du logements seront vigilants pour que l’édifice construit par la loi ne soit pas fragilisé par les décrets à venir. Ils jugeront à la fin du processus les vraies avancées apportées par la loi.