Jamais un gouvernement fédéral n’avait affiché de tels objectifs environnementaux. Il aura fallu attendre l’élection de Barack Obama pour voir la politique énergétique élue au rang de priorité aux Etats-Unis.

L’Amérique serait-elle sur la voie de la conversion écolo ? Depuis son investiture le 20 janvier 2009, le président américain multiplie les prises de positions en faveur d’un réalignement général des Etats-Unis dans le jeu mondial pour la sauvegarde de l’environnement. Une posture d’autant plus frappante qu’elle rompt assez radicalement avec les années Bush, notoirement et cyniquement indifférentes aux enjeux écologiques.

Jugeons plutôt :150 milliards de dollars consacrés dans les dix ans à la politique climatique. Le plan “new energy for America” est articulé autour de deux volets : l’optimisation de l’efficacité énergétique (45 milliards de dollars) et le développement des énergies renouvelables (30 milliards de dollars). D’ici 2012, 10% de l’électricité consommée aux Etats-Unis doit être issue de sources renouvelables, et 25% en 2025.

Le gouvernement fédéral prévoit une enveloppe de 21 milliards de dollars d’exonérations fiscales pour les citoyens qui investiront dans les énergies propres (solaire, éolien, biocarburants, géothermie) et des voitures électriques.

Autre terrain d’attaque : le ferroviaire. Une gageure dans un pays qui a toujours tout misé sur la voiture et l’avion. C’est la première fois qu’un gouvernement américain propulse la grande vitesse au rang de ses priorités et met en face un vrai programme de financement : 13 milliards de dollars sur cinq ans. Selon une récente étude, le programme ferroviaire de l’administration Obama pourrait diminuer de 2,7 milliards le nombre de tonnes de CO2 émises chaque année. Le projet porte sur une dizaine de corridors, en Californie, en Floride, ou encore en Nouvelle-Angleterre. Objectif annoncé : atteindre une moyenne de 350km/h sur les lignes à grande vitesse, alors qu’aujourd’hui, seules cinq d’entre elles dépassent les 127km/h.

Cette “green economy” vise deux objectifs majeurs. D’abord une autonomie énergétique progressive des Etats-Unis, qui passe par la réduction de la dépendance au pétrole étranger. Ensuite la création en masse de cinq millions d’“emplois verts” (l’industrie verte produisant quatre fois plus d’emplois que l’industrie pétrolière), emplois doublement vertueux puisqu’ils sont à la fois propres et non-délocalisables. Côté politique industrielle, la Maison Blanche entend créer des programmes fédéraux de formation dans des métiers des technologies propres, pour reconvertir les salariés des industries sinistrées.

Il s’agit, à échéance 2020, de ramener les émissions américaines à leur niveau de 1990, puis de les réduire de 80 % à l’horizon 2050. Pour ce faire, l’administration Obama a notamment opté pour un marché des droits d’émission de gaz à effet de serre, sur le modèle de ce qui existe au sein de l’Union européenne. Les entreprises pourront ainsi acheter et vendre des permis de polluer. Objectif : mettre aux enchères 100 %des quotas de carbone (en visant 650 millions dollars de recettes en 2019). On s’en doute, l’injonction passe plutôt mal auprès de la corporation industrielle américaine qui a déjà demandé quelques dérogations sous forme de permis de polluer gratis.

Aux commandes de ce programme inédit par son ambition, une équipe constituée autour de Steven Chu, le secrétaire d’Etat à l’énergie et prix Nobel de physique 1997, et de Carole Browner, ex-patronne de l’Agence de protection de l’environnement, aujourd’hui en charge d’un comité de coordination énergie climat à la Maison Blanche.

Au sujet de Muriel Jaouën

Journaliste de formation (ESJ Lille, 1990), Muriel Jaouën publie régulièrement dans le magazine de Place-Publique. Ses spécialités : économie sociale, développement durable, marketing, communication, organisations, management.

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ENVIRONNEMENT

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