Une protéine dans le sang pourrait fournir des indications précieuses sur la santé de tout un chacun, voire sur son espérance de vie. L’exploitation de cette découverte d’un marqueur général de l’état de santé, du chercheur danois Jesper Eurgen-Olsen, à travers une simple prise de sang, n’est pas sans soulever certaines questions éthiques.

Le suPAR, c’est le nom de cette protéine découverte dans le sang. SuPAR pour « soluble urokinase plasminogen activator receptor », une protéine qui se mesure par nanogramme par millimètre.

C’est un bio marqueur indépendant sur l’état général de santé. C’est-à-dire qu’à la différence des autres marqueurs, il n’est pas lié à un type de pathologies.

Le niveau de suPAR est une sorte de baromètre : 3ou 3,5, tout va, au-delà de 4,5-5, il est probable que le sujet va développer une ou plusieurs maladies, et aura une espérance de vie moindre. Car le niveau élevé de suPAR traduit un désordre dans le système inflammatoire et immunitaire.

En clair le corps a un problème ou va l’avoir. Lequel ? Il faut creuser.

C’est pourquoi Jesper Eurgen-Olsen père de ce marqueur l’appelle la protéine « Boule de cristal » comme il l’explique au Copenhagen Institute for Futures Studies (www.cifs.dk) dans un article du magazine Scenario, à quelques jours du symposium international qui se tient sur le sujet ( 7 et le 8 mars à Copenhague)

Le test sanguin suPARnostic a été développé par la société danoise ViroGates. Des études ont montré que les personnes présentant des taux élevés de suPAR couraient davantage de risque de décéder des suites d’une maladie que celles ayant des taux plus faibles de cette protéine. Initialement la société ViroGates est spécialisée dans le diagnostic rapide de maladies grâce à des kit , notamment pour le HIV. De ces recherches ont dérivé des moyens de diagnostic pour d’autres maladies à destination de pays en voie de développement où il faut agir efficacement.

Un programme financé par l’UE a permis de montrer qu’un simple test sanguin permettait de déterminer les patients les plus susceptibles de succomber à une maladie, et qu’il fallait garder à l’hôpital pour des tests plus poussés et des traitements. Cela fut utilisé par exemple sur des patients exposés à la tuberculose en Afrique, afin de d’appréhender la progression et la survie à cette maladie. «L’une des plus grandes difficultés dans le traitement des patients sérieusement atteints est d’identifier ceux qui développent une maladie mortelle», explique un des membres du programme. «Une fois identifiés, on peut administrer des soins appropriés à ces patients et leur éviter une issue fatale ». Il permet d’appréhender les chances de réponse à une thérapie, si le patient doit être traité vite ou peut attendre….

En fait, depuis lors, les recherches autour du suPAR ont permis de donner un état des lieux de la santé globale et donc de sa chance bien vivre. Un niveau élevé de suPAR est associé à un pronostic négatif et un risqué plus élevé, car il est positivement corrélé au marqueur de l’activation du système inflammatoire et immunitaire. Aussi est-il pertinent pour déceler des risques de scléroses, cancers, pathologies cardio-vasculaire, diabète de type 2….
Dès lors comment gérer son niveau de suPAR ? « On peut utiliser activement le niveau suPAR en adaptant son style de vie, alors qu’on a un risque établi accru de développer certaines pathologies et de moins y résister » poursuit Jesper Eurgen –Olsen. Et à partir de là, agir.

Evidemment de nombreuses questions éthiques se soulèvent derrière ce qui serait au départ une banale prise de sang.

Chacun pourrait établir une sorte de « risk management » de sa santé en fonction de son niveau de suPar et d’une éventuelle idée de ce que pourrait être son espérance de vie.

Voilà pour ce qui est de l’individu. Mais qu’en est-il de la société ?

D’autres questions émergent. Ne va-t-on pas se voir obligé par tel ou tel organisme de santé ou mutuelle à prendre certaines mesures en fonction de son niveau de suPAR, par exemple selon qu’on ait ou pas une chance de réagir à un traitement….

Ne risque t-on pas d’assister à des demandes de la part d’assureurs, banquiers, voire employeurs en quête de connaître le niveau de suPAR de leurs clients, et donc leur risque de développer un jour une pathologie, et d’avoir aussi ainsi un indicateur de leur longévité.

Au sujet de Estelle Leroy

Estelle Leroy-Debiasi est journaliste professionnelle, Diplômée en Economie, ex rédactrice en chef du quotidien économique La Tribune. Elle contribue régulièrement au site ElCorreo, site de la diaspora latinoamericaine.

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