Amnesty International, la Fédération internationale des ligues des droits de l’homme (FIDH), le Comité Kosovo, l’Association Sarajevo, SSVDS (association de soutien aux survivants de la vallée de la Drina et de Srebrenica), l’Association Guernica s’inquiètent de la prochaine fermeture du TPIY alors que quatre des principaux responsables des massacres commis dans les Balkans entre 1991 et 1995 n’ont toujours pas été arrêtés et que de nombreuses procédures sont toujours en cours. C’est pourquoi nos organisations rappellent au Conseil de Sécurité des Nations Unies, au TPIY et la communauté internationale, dont la France en tant que future présidente de l’Union Européenne, les principes qui doivent guider leur action afin de lutter efficacement contre l’impunité des crimes commis dans les Balkans.

1 – Le Conseil de Sécurité ne doit pas chercher à respecter de façon arbitraire les chances qu’il s’était fixées dans sa résolution 1503 (qui date de 2003) sur la stratégie d’achèvement du TPIY, à savoir fin 2008 pour les procès en première instance et 2010 pour les procès en appel. Il faut donner au TPIY le temps et les ressources suffisants pour mener à leur terme tous les procès importants et les procédures d’appel.

2 – Le Conseil de Sécurité, les Etats qui abritent les accusés en cavale et le reste de la communauté internationale doivent prendre les mesures appropriées pour que Ratko Mladic, Radovan Karadzic, Goran Hadzic et Stojan Zupljanin, qui sont toujours en fuite, soient arrêtés et traduits devant le TPIY sans plus de délai.

Au cas où les quatre hommes n’auraient pas été arrêtés et remis au TPIY quand tous les autres accusés auront été jugés, des mécanismes internationaux indépendants, libres de toute pression extérieure, devront être créés de façon à ce que, au moment de leur arrestation, le TPIY puisse garantir qu’ils seront poursuivis pour les crimes dont ils ont été accusés, soit devant le TPIY, soit devant un tribunal national qui réponde aux standards les plus élevés de la justice internationale dans tout pays capable de garantir le droit à un procès équitable devant des juges compétents, indépendants et impartiaux, qui n’applique pas la peine de mort et ne recourt ni à la torture ni aux mauvais traitements.

3 – Le TPIY ne doit prendre aucune mesure pour accélérer les procès en cours, ce qui constituerait une violation des droits de l’homme et de la garantie donnée aux accusés d’un procès international équitable.

Le TPIY ne doit transférer aucun de ses dossiers vers des juridictions nationales à moins :

 d’avoir la garantie qu’un procès équitable, conforme aux standards les plus élevés de la justice internationale, aura lieu devant des tribunaux compétents, indépendants et impartiaux ;

 que les droits des accusés soient respectés avant, pendant et après le procès, y compris en cas d’appel, notamment qu’ils soient à l’abri de la torture et des mauvais traitements ;

 que les victimes et les témoins soient efficacement protégés;

 que la peine de mort ne soit pas appliquée.

5 – Dans le cadre de la politique d’achèvement du TPIY, Il est important de prévoir la mise en place de mécanismes résiduels efficaces

 pour assurer une meilleure coopération des Etats en vue de l’arrestation et de la remise à la justice des accusés qui sont encore en fuite ;

 pour garantir que toute personne arrêtée et livrée au TPIY sera poursuivie soit devant le TPIY, soit devant une juridiction nationale répondant aux critères énumérés au point 2 du manifeste.

 pour fournir de façon durable protection et soutien aux victimes et aux témoins.

 pour gérer les archives du TPIY de façon indépendante et impartiale. Elles seront confiées à un organisme indépendant qui ne soit pas soumis à la pression des Etats, capable d’assurer l’accès à ces archives aux tribunaux compétents chargé de poursuivre ces procédures et au public le plus large possible tant qu’il reste compatible avec la sécurité des victimes et des témoins ;

 pour veiller l’application des condamnations prononcées à l’encontre des accusés ;

 pour prévoir l’éventuelle révision des condamnations, qui ne pourrait être basée que sur la découverte de faits nouveaux, par un tribunal indépendant et impartial et pour le cas où il faudrait modifier les conditions d’emprisonnement pour des raisons humanitaires.

6 – Prolongement du travail du TPIY

Le TPIY et la communauté internationale doivent établir, après consultation de la société civile et en toute transparence, des programmes nationaux destinés à mettre en place des stratégies de lutte contre l’impunité dans tous les pays des Balkans. Ils devraient prévoir le déclenchement d’enquêtes et de poursuites à l’encontre des milliers d’autres personnes soupçonnées de meurtres, viols, actes de torture, disparitions forcées et autres crimes au regard du droit international qui ont été commis pendant le conflit.

7 – Une attention particulière doit être portée non seulement au sort des témoins qui ont bénéficié de mesures de protection lors de leur audition mais aussi au soutien apporter aux ONG locales qui ont collaboré avec le tribunal et qui, comme le Humanitarian Law Center Belgrade, font encore aujourd’hui l’objet de menaces.

8 – Nous espérons que la France mettra profit sa prochaine présidence de l’Union Européenne pour poser la question de l’achèvement des travaux du TPIY au Conseil Affaires Générales de l’UE, en rappelant que l’UE a un devoir de justice vis-à-vis des victimes de ce conflit et en soulignant que l’accomplissement de ce devoir contribuera à rétablir une paix durable dans la région.

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