Selon un sondage Banque de France/sofres, 59% des Français jugent le niveau des Français en économie comme moyen et 32% comme faible .

Crise monétaire, dette publique, désindustrialisation, transition énergétique, chômage, avenir de la protection sociale…, il n’est plus un jour sans que l’un ou l’autre de ces sujets ne soit abordé dans les médias. La vie quotidienne de chacun est elle-même directement impactée par ces chiffres, ces indicateurs, ces mécanismes souvent complexes dont on ne saisit pas toujours la signification, les causes et les répercussions. C’est dans ce contexte, que les Journées de l’Economie (JECO), gratuites et ouvertes à tous, remplissent une mission pédagogique essentielle en proposant de décrypter, analyser et mettre en perspective les questions que posent ces sujets d’actualité.

Oeuvre utile, car on ne saurait le souligner, les Français sont quelque peu fachés avec l’économie. 6 Français sur 10 jugent le niveau des Français moyen en économie. Selon Pascal Le Merrer, professeur d’économie à l’ENS Lyon et fondateur des Jeco qui se sont tenus à Lyon, du 8 au 10 novembre 2012: « En quelques années, ce qui a changé c’est que l’économie est à la une de l’actualité, on parle de choc de compétitivité, d’union bancaire, de pacte budgétaire européen… ». Pour ce dernier, ces chiffres montrent que les Français essayent de comprendre ce qui se passe mais avec plusieurs difficultés : l’impression que les experts débattent entre eux; la méfiance à l’égard des réformes qui se préparent; la difficulté à évaluer l’impact de changements macroéconomiques sur leur vie quotidienne.

« Si à cela, on ajoute que la majorité des Français n’ont jamais eu accès à des cours d’économie dans leur scolarité, il est étonnant que l’on arrive à ce que deux tiers des sondés trouve le niveau de connaissances des Français en économie élevé ou moyen. A noter que les réponses des femmes sont plus optimistes que celles des hommes et que la vision du niveau des français est d’autant moins favorable que les sondés ont un niveau d’étude élevé », explique-t-il.

60% des Français jugent l’information économique complexe

« Les Français sont confrontés à des sujets techniques avec beaucoup de données qui sont présentées comme des évidences. On remarque que pour cette question ce sont les hommes, et en particuliers les moins de 35 ans qui sont les plus optimistes (44 % des moins de 35 ans trouvent l’information économique compréhensible contre 33 % pour les plus de 65 ans) » précise Pascal Le Merrer.

Ce chiffre révèle que les journalistes économiques ont un travail complexe à faire, à la fois d’investigation pour ne pas laisser les stratégies de communication des acteurs publics comme privés prendre le pas sur l’information, mais aussi de médiation, pour rendre compréhensible des analyses que l’on ne peut confier simplement à des experts à qui on tend facilement un micro. Enfin, je pense qu’il y a de réelles complémentarités entre l’information télé, radio, presse écrite, internet, là c’est le modèle de l’information du XXIe siècle qui est en jeu.

« Pour aller plus loin, poursuit Pascal Le Merrer,il me semble avec ces deux questions qu’il est difficile de séparer formation et information en économie, il faut privilégier des moments où l’on combine la réflexion sur des faits, des politiques avec la présentation des analyses d’économistes qui expliquent comment ils raisonnent et pourquoi ils peuvent diverger dans leurs conclusions. »

Sauf quand ça les concerne directement

Les Français ont en effet de bonnes connaissances du fonctionnement des placements “quotidien” des Français : livrets A, prêt immo… et les bonnes performances en calcul sur les intérêts composés. « Les réponses à ces deux questions confirment une chose que nous avions déjà identifiée dans un sondage l’an dernier, les Français ont deux visions très différentes de la finance, commente Pascal Le Merrer. Concernant leurs finances personnelles, il se sentent bien informés sur les produits d’épargne traditionnels et sur les crédits proposés. Souvent cette vision va de pair avec une relation de confiance entre les Français et leur conseiller dans leur agence bancaire.

En revanche, dès que l’on traite du système bancaire et financier, la vision est très différente, c’est un monde opaque qui inspire plutôt la défiance. « On voit par exemple que sur les produits qui s’échangent sur les marchés financiers (actions, obligations, SICAV…) il n’y a plus que 34 % des sondés qui se sentent bien informés contre 63 % pour des produits comme les livrets d’épargne ou l’assurance vie, indique Pas Le Merrer Enfin, ce sont les plus de 50 ans et les ménages en situation d’épargner qui se sentent le mieux informé, ce qui veut dire que c’est l’expérience qui joue un rôle déterminant et en conséquence il y a un public jeune et en situation précaire qui devrait être davantage accompagné pour gérer les difficultés financières qu’il rencontre. L’enjeu est considérable, la France est un pays qui épargne beaucoup mais pourtant le financement de l’économie est problématique tant du côté public que du côté des entreprises »
Un paradoxe à résoudre.

Au sujet de Yan de Kerorguen

Ethnologue de formation et ancien rédacteur en chef de La Tribune, Yan de Kerorguen est actuellement rédacteur en chef du site Place-Publique.fr et chroniqueur économique au magazine The Good Life. Il est auteur d’une quinzaine d’ouvrages de prospective citoyenne et co-fondateur de Initiatives Citoyens en Europe (ICE).

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