Une étude « Les Français et la politique industrielle de la France » réalisée par OpinionWay pour OPEO (www.opeo-conseil.fr) et dévoilée le 9 novembre 2016, à l’occasion des Rencontres pour la Compétitivité Industrielle, mesure la perception qu’ont les Français du secteur industriel. Dans un contexte d’élections nationales qu’est ce que les Français identifient comme atouts et faiblesses de l’industrie en France ?

Le poids de la fiscalité, mais aussi du Code du travail, les délocalisations, ainsi que la critique de la politique menée par l’État dans le domaine industriel constituent autant de problèmes cités, à nouveau, par les Français. Ces faiblesses prouvent néanmoins que, pour les Français, le problème n’est pas endogène à l’industrie elle-même.

Les Français persistent dans leur jugement : pour eux, l’industrie française est depuis trop longtemps handicapée

La perception des Français vis-à-vis des politiques industrielles gouvernementales menées depuis 10 ans n’a pas changé : ni le quinquennat de Nicolas Sarkozy (73 %) ni celui de François Hollande (80 %) n’auront suffi à donner à l’industrie française un nouvel élan. L’industrie française reste entravée selon les Français : la fiscalité demeure trop importante pour 53 % des Français interrogés. Les délocalisations (50 %) et le droit du travail (38 %) constituent deux autres faiblesses importantes pour l’industrie française. Ces éléments, pour autant qu’ils dressent un état du scepticisme, ne sont pas
neufs et confirment les résultats d’enquêtes précédentes (cf. note détaillée ou infographie).

La vraie nouveauté : la multiplication des raisons d’espérer

Malgré ces difficultés, les Français croient encore en leur industrie. Ils s’intéressent à son renouveau, connaissent ses points forts. Ils mettent en avant les atouts importants de l’industrie française comme ses filières d’exception ou encore sa main-d’œuvre qualifiée. Ils avancent également le capital immatériel de l’industrie française, et notamment le prestige du « Made in France », marque reconnue à l’étranger. Ils connaissent les grands plans industriels du moment : Industrie du futur, Usine du futur, French Fab, Excellence opérationnelle.

Si les Français réaffirment les points faibles de l’industrie, ils sont également conscients de ce qui fait sa richesse. C’est là une véritable nouveauté : les Français ont une perception de l’industrie fidèle à la réalité et témoignent d’une curiosité renouvelée et d’un degré de connaissance sur les politiques industrielles assez neuf.

Quatre grandes régions symbolisent particulièrement bien l’industrie française pour les Français:

L’Ile-de-France, le Grand-Est (soit l’Alsace-Champagne-Ardenne-Lorraine), l’Auvergne- Rhône-Alpes et les Hauts-de-France (Nord-Pas de Calais-Picardie), avec 35 % à 39 %, occupent la tête du classement. La Nouvelle Aquitaine (Aquitaine-Limousin-Poitou-Charentes) arrive en cinquième position avec 19 %. Ce top 5 est conforme à la situation de l’industrie française, bien qu’admettant quelques différences de hiérarchie : d’après les chiffres de l’INSEE, l’Auvergne-Rhône-Alpes est la région française qui emploie le plus de salariés dans le secteur industriel, devant l’Ile-de-France et le Grand Est, les Hauts-de-France arrivant quatrième, avant la Nouvelle Aquitaine.

De la même manière, les Français s’intéressent également au renouveau de l’industrie française, et notamment aux plans et concepts visant à la redynamiser. Si à première vue les taux de notoriété semblent peu élevés, ils s’avèrent en fait importants eu égard à leur spécificité, puisque s’adressant surtout à des professionnels à des fins techniques et stratégiques. Ainsi, les projets institutionnels disposent de taux de notoriété importants. Industrie du Futur, nouvelle matrice de la stratégie industrielle qui a pour ambition d’amener chaque entreprise à moderniser et transformer l’industrie grâce au numérique, a été lancée par le président de la République en avril 2015. Ce projet est
aujourd’hui connu par 31 % des Français. Le plan Usine du futur, plus ancien et à dimension multirégionale, est connu par 26 % des interviewés. Un Français sur quatre connaît le concept de French Fab, développé par Bpifrance (25 %). Le projet Industrie 4.0, d’origine allemande, est connu quant à lui par 16 % des Français. Enfin, le concept d’Excellence Opérationnelle qui correspond à « un comportement d’entreprise agile pour améliorer ses performances dans un contexte de marchés mondialisés et volatils en s’appuyant sur les humains qui la composent » » est connu par 19 % des interviewés.

Les Français, fiers du capital matériel et immatériel de leur industrie, continuent d’y voir un secteur d’avenir

Forte de ses atouts, l’industrie incarne pour eux un secteur d’avenir, et une majorité de Français recommanderait à ses enfants d’y travailler. Cette conception positive de l’avenir de l’industrie française est particulièrement importante chez les personnes travaillant dans le secteur industriel. C’est là un signe particulièrement favorable : la proximité du terrain industriel entraine l’incitation, plutôt que le désaveu.

L’élément encourageant est le niveau d’attachement des Français à leurs filières industrielles

es filières d’exception constituent le principal point fort de l’industrie française aux yeux des interviewés (55 %). Dominant le marché avec des groupes internationaux à forte visibilité, le luxe est perçu par les Français comme étant le secteur industriel français le plus performant (50 %). Berceau de l’aviation et disposant de grands fleurons, la France détient aussi la réputation d’exceller dans la construction aéronautique ou spatiale (38 %). La construction navale (29 %), le nucléaire (26 %) et
l’armement (20 %) comptent parmi les autres secteurs qui se classent dans le top 5 des secteurs industriels les plus performants aux yeux des Français.

Si la France a acquis cette renommée dans des secteurs très différents de l’industrie, c’est aussi grâce à l’image que renvoie la production française, une image de qualité unique qu’elle sait valoriser : pour 43 % des personnes interrogées le prestige du « Made in France » est un de ses principaux atouts.

Ce rayonnement de l’industrie hexagonale, dont la qualité de sa production est source de fierté et vantée, est permise grâce à ses hommes et ses femmes et à leurs compétences propres : pour 41 % des interviewés l’industrie française dispose de savoir-faire qu’on lui envie et qui sont exportés dans le monde entier et surtout, pour 53 %, d’une main-d’œuvre qualifiée.

De la même manière, 70 % des Français considèrent que l’industrie propose des métiers d’avenir. Ceux qui y travaillent personnellement ou qui ont un proche qui y travaille croient encore plus que les autres que les métiers que propose ce secteur correspondront parfaitement aux besoins des prochaines années ou décennies (75 %).

L’industrie trouve alors plus que jamais sa place dans les conseils d’orientation aux plus jeunes : plus d’un Français sur deux recommanderait à ses enfants de travailler dans l’industrie (57 %). Symboles d’un secteur qui souhaite perdurer, les personnes les plus directement concernées sont les meilleurs ambassadeurs de l’industrie : 66 % des personnes travaillant ou ayant un proche travaillant dans l’industrie inciteraient leurs enfants à envisager une carrière dans ce domaine.

Les Français attendent que les pouvoirs publics fassent du renouveau industriel un enjeu prioritaire

L’industrie est perçue par tous comme un enjeu stratégique. Les Français souhaitent que la question industrielle soit placée au cœur de l’élection présidentielle. Une majorité considère même que les positions des candidats sur ce sujet seront déterminantes pour faire leur choix.
L’élection présidentielle prochaine sera l’occasion de proposer des solutions concrètes pour redresser la compétitivité industrielle française, et c’est ce que 75 % des Français interrogés attendent, à droite comme à gauche. Alain Juppé et Emmanuel Macron sont les personnalités politiques susceptibles de proposer la politique industrielle la plus efficace selon les Français (respectivement 42 % et 41 %). Suivent Arnaud Montebourg (31 %) et François Fillon (29 %).

*Cette étude a été réalisée auprès d’un échantillon de 1500 personnes, représentatif de la population française âgée de 18 ans et plus, constitué selon la méthode des quotas.

Au sujet de Yan de Kerorguen

Ethnologue de formation et ancien rédacteur en chef de La Tribune, Yan de Kerorguen est actuellement rédacteur en chef du site Place-Publique.fr et chroniqueur économique au magazine The Good Life. Il est auteur d’une quinzaine d’ouvrages de prospective citoyenne et co-fondateur de Initiatives Citoyens en Europe (ICE).

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ECONOMIE

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