En poussant la porte, ça sent le café torréfié à l’ancienne, le chocolat récolté équitablement, le pain pétri à la main, et derrière le comptoir, les vendeurs, vendeuses connaissent leurs produits. Dans les trois boutiques parisiennes gérées par l’association Terem on y achète, on y vend, mais on s’y forme aussi.

Derrière le comptoir ceux qui encaissent et emballent sont en réalité de faux vendeurs. Pas tout à fait faux: ils sont là pour apprendre le métier et espèrent tous décrocher un CDI dans la grande distribution ou la plus petite, après. Cette méthode de formation-action donne des résultats. Environ 70% des vrais-faux vendeurs passés par cette porte sont depuis vendeurs en pied dans d’autres commerces. Ils étaient inscrits dans la catégorie chômeurs en grande difficulté quelques mois auparavant.

« CES, chantiers d’insertion, ateliers de découverte des métiers, évaluation en milieu de travail » , Michèle égraine les types de contrats employés par l’association, raconte les circonvolutions et autres bidouillages qu’elle effectue pour « faire vivre » ces boutiques pédagogiques. « Depuis que Jean-Louis Borloo est à l’Emploi, les vieux dispositifs ont été remisés. Les nouveaux se font attendre. Les chômeurs, rmistes trinquent. Des associations comme la nôtre manquent de tomber. Dernièrement, j’ai eu un groupe envoyé par l’ANPE, pour une évaluation en milieu de travail, 15 personnes pendant 15 jours payé 2 euros de l’heure par personne » . Elle rit. Elle a fait toute sa carrière dans la grande distribution, du bas du rayon au bureau du directeur. A 53 ans, elle est dehors, licenciée économique. A 54 , elle l’est toujours, victime du délit de vieille gueule. Elle s’inscrit à une formation de formateur.

Depuis, elle y croît pour les autres. Elle veut les sortir du RMI, des nuits d’hôtel, de la rue.

Hier, elle était à une réunion d’information sur les nouveaux contrats aidés, à l’ANPE. En aparté, la conseillière qui la connaît bien lui a glissé: « Je prendrais trois heures pour venir vous expliquer tout ça efficacement ». « Le pire, c’est que j’suis pas douée pour la paperasse », reconnaît-elle. « Mais quand je vois les situations inextricables dans lesquelles vivent ceux que nous employons, je ne fais pas la difficile ».