Là ou s’arrête le pouvoir des mots commence celui de la musique. Des chercheurs témoignent du rôle capital qu’elle joue dans les phénomènes d’apprentissage, de guérison et dans les processus cérébraux.

On apprendra à personne que la musique adoucit les mœurs et que sa fonction sociale de divertissement est de plus en plus importante.

Le frisson musical dans les concerts est l’un des principaux facteurs de rassemblement pour les jeunes, là où va le gros de leur argent de poche.
La musique est aussi un motif de plaisir et de plénitude pour les seniors, passionnés de chorales et de festivals. La musique est enfin le moyen d’expression universelle par excellence comme en témoigne la Fête de la musique célébrée dans plus de 120 pays et la «généralisation des ipods ».

Des études d’imagerie, menées à l’Université Mc Gill au Québec ont montré pour la première fois que la musique active, elle aussi, dans le cerveau, les centres de récompense ou de plaisir qui sont associés à la nourriture ou au sexe. L’étude est révélatrice, car elle laisse entendre que la musique est aussi utile pour nous que les stimuli reliés à la survie biologique. « Bien que nous puissions en théorie vivre et nous reproduire sans la capacité d’apprécier la musique, celle-ci semble importante pour ce qui est de notre bonheur et de notre bien-être », indique Anne Blood, coauteure de l’étude.

Des chercheurs du CNRS*(1) ont voulu aller plus loin en s’attachant à analyser pourquoi et comment cet art, qui marque les évènements les plus significatifs de la vie des gens, influe non seulement sur les comportements humains mais aussi sur les processus cérébraux. Ils se posent la question :

Tout être humain a-t-il à la naissance un cerveau pré-câblé pour la musique, comme cela semble être le cas pour le langage ? La musique constitue-t-elle une forme autonome et spécifique de la cognition, et un mode d’expression particulier de notre cerveau ?

Une chose est sûre, étudier la musique sous le rapport de la biologie permet, au-delà des enseignements musicaux, de mieux saisir comment le cerveau fonctionne. Le plaisir qu’on prend à telle ou telle musique, triste ou enlevée, active autant d’aires cérébrales distinctes.

Observant les réponses physiologiques du corps humain à différentes musiques chez 50 personnes, une chercheuse du Laboratoire de neurophysiologie et neuropsychologie de Marseille, Stephanie Khalfa, note que « des changements apparaissent très tôt une à trois secondes après le début de l’écoute ». Ils révèlent des émotions de gaieté ou de peur qui transparaît sur le visage, la paume des mains, la respiration.

Les recherches sur la question nous apprennent aussi que nous serions égaux devant la musique. « Pas de différence entre un musicien averti et un profane« , explique Emmanuel Bigand , directeur du LEAD. Il a fait le bilan. Les auditeurs anticipent les mêmes structures musicales complexes, qu’ils aient suivi les cours du Conservatoire ou pas. Ainsi une vingtaine d’enfants ont pu développer les mêmes capacités musicales auditives que celles d’enfants du Conservatoire.

Ecouter passivement un air de musique classique permet un apprentissage implicite. Avoir l’oreille musicale n’est donc pas génétique, cela s’acquiert. Ce qui fait dire François Madurelle, musicologue, que ce sont les conventions sociales qui font qu’il y a une coupure entre musique savante et musique profane.

Si la musique adoucit les mœurs, elle soigne aussi les maux.

Des expériences menées auprès d’enfants dyslexiques par Mireille Besson et Michel Habib de l’INCM de Marseille, ont montré que la musique pouvait pallier à certains de leurs troubles. Et cela, que l’enfant soit directement confronté à sa difficulté.

Un neuropsychologue de l’université de Caen, Hervé Platel*(2), s’est penché sur des personnes souffrant de la maladie d’Alzheimer. Pour vérifier si ces derniers sont capables d’un apprentissage musical, il a organisé six séances d’enseignement de chansons nouvelles. Résultat : « ces derniers sont effectivement capables de restituer une mélodie lorsqu’on les aide à retrouver les paroles de la chanson. Malgré les troubles avérés du langage et des concepts sémantiques, certaines capacités musicales sont conservées ».
En outre, affirment deux sociologues du Clerse, à Lille, Hervé Glevarec et Michel Pinet, la musique tend à démocratiser les rapports sociaux. Le lien rigide qui existait entre les genres musicaux et les milieux sociaux n’est plus de mise depuis la naissance du rock et de la pop music. « Concernant le rock, par exemple, on ne constate aucun écart statistique entre le taux de préférence des cadres et le taux des ouvriers »

• (1) Lire Journal du CNRS n°209. Juin 2007
• (2) « Le cerveau musicien » avec B. Lechevalier, F.Eustache. Editions De Boeck.

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