Le pôle Ville de Terra Nova soutient des métropoles ambitieuses pour Paris et Aix-Marseille. Cette fabrique de la métropole doit s’inscrire dans un processus collectif d’innovation et d’expérimentation qui couvre tous les domaines de la production urbaine à des échelles géographiques élargies. Cette étude explore de nombreux défis qui y sont associés.

Le 1er janvier 2016, deux nouvelles grandes métropoles verront le jour : la Métropole du Grand Paris et la Métropole Aix-Marseille-Provence. Elles complèteront la carte des métropoles françaises créées en 2015 pour répondre aux nombreux défis auxquels font face les plus grandes villes. L’enjeu pour les agglomérations de Paris et d’Aix-Marseille est de gagner en performance économique, mais pas seulement : elles doivent aussi conduire des politiques fortes pour lutter contre les nombreuses inégalités qui maillent leurs territoires et pour s’engager dans une véritable transition écologique. L’émergence de la métropole doit s’inscrire dans un processus collectif d’innovation et d’expérimentation qui couvre tous les domaines de la production urbaine à des échelles géographiques élargies. Aménagement, mobilité, logement, développement économique, culture : les défis sont nombreux.

Un bon fonctionnement démocratique est une condition de la réussite du projet métropolitain. Or les territoires de l’Ile-de-France et des Bouches-du-Rhône souffrent aujourd’hui d’un fractionnement de la décision qui nuit tant à l’activité économique qu’aux services publics et donc aux habitants. Même si la loi Modernisation de l’Action Publique Territoriale et d’Affirmation des Métropoles (MAPTAM) de 2014 a permis d’avancer vers une rationalisation de l’intercommunalité dans ces deux territoires, le fonctionnement institutionnel reste encore obscur pour le citoyen. Quant au projet de loi Nouvelle organisation territoriale (NOTRe), censé justement pallier les manquements de la loi MAPTAM, il n’a pas encore apporté les éclaircissements souhaités. Au contraire, il a même introduit de nouvelles sources de complexité, en particulier pour la Métropole du Grand Paris.

Pour réussir le pari métropolitain, il est donc indispensable de faire émerger un véritable leadership au sein de ces deux métropoles. Nous préconisons des conseils métropolitains plus resserrés dès 2016. Le choix d’un scrutin sur le modèle des élections régionales permettrait également d’assurer une représentation paritaire de tous les territoires ainsi qu’une meilleure représentation de la diversité des populations.

Une révision du périmètre étendu à la région Ile-de-France pour la métropole parisienne et au département des Bouches-du-Rhône pour la métropole marseillaise, est vraisemblablement la meilleure solution à terme pour réduire efficacement la fragmentation institutionnelle dont souffrent ces territoires. Cette solution confierait aux métropoles un ensemble de compétences permettant ainsi d’intégrer de manière efficace les politiques d’aménagement avec des objectifs sociaux, économiques et environnementaux définis à une échelle élargie. Une organisation institutionnelle efficace peut tout à fait combiner une gouvernance métropolitaine à grande échelle et des maires et conseillers municipaux de proximité. En Ile-de-France, les compétences fonctionnelles des départements devraient ainsi être confiées à la région métropolitaine. Dans le même temps, il nous paraît aussi souhaitable de conforter les « territoires » qui ont été créés par la loi MAPTAM et qui pourraient devenir à terme des collectivités à part entière avec des périmètres comparables à celui de la ville de Paris.

Aujourd’hui, alors que les débats parlementaires vont se poursuivre sur les compétences à confier aux métropoles, nous insistons sur la nécessité de maintenir des orientations ambitieuses pour l’intégration à une échelle élargie des politiques de planification, d’aménagement et de transport. Le pouvoir de véto des maires sur les plans locaux d’urbanisme intercommunal (PLUI) doit être par conséquent évité. Nous proposons également de renforcer les compétences de planification et d’aménagement à l’échelle des Bouches-du-Rhône et de l’Ile-de-France. Par ailleurs, pour réaliser des politiques de mobilité cohérentes, toutes les compétences associées (voirie, stationnement) pourront être remontées au niveau d’une seule et unique autorité organisatrice de mobilité durable. Plus d’ambition pour la péréquation fiscale est aussi nécessaire dans chaque métropole.

Il faut enfin s’assurer que la construction d’une stratégie métropolitaine, associant tous les acteurs et impliquant au mieux les citoyens, ne soit pas bloquée par des guerres de clochers. De nombreux investissements sont en effet essentiels et à réaliser au plus vite pour les deux métropoles, que ce soit dans les transports collectifs, la transition écologique, le logement ou encore l’aménagement urbain. Un fonds d’investissement métropolitain renforcé pourra contribuer à les accélérer tout en participant à réduire les disparités territoriales sur les deux métropoles. Les clivages locaux doivent être dépassés au profit de débats plus constructifs pour accélérer les investissements les plus pertinents et donner sens au projet métropolitain pour le citoyen.

Au sujet de Yan de Kerorguen

Ethnologue de formation et ancien rédacteur en chef de La Tribune, Yan de Kerorguen est actuellement rédacteur en chef du site Place-Publique.fr et chroniqueur économique au magazine The Good Life. Il est auteur d’une quinzaine d’ouvrages de prospective citoyenne et co-fondateur de Initiatives Citoyens en Europe (ICE).

Catégorie(s)

VILLE & URBANISME

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