L’Association Pasc@line et la SIF- Société Informatique de France ont réuni récemment des dirigeants de grandes écoles, universitaires, chercheurs, chefs d’entreprise et responsables politiques afin d’apporter leurs réflexions sur les moyens de développer l’innovation dans les formations du supérieur. Selon un Rapport de l’Observatoire Pasc@line 2014 ( www.assopascaline.fr) «L’enseignement doit évoluer pour mieux encourager la créativité, l’innovation et la capacité à piloter les transformations des organisations.»

Un des enjeux du développement de l’innovation dans les entreprises est de créer des partenariats, précise Pierre-Louis Xech, responsable des partenariats recherche chez Microsoft, comme c’est le cas chez Microsoft avec les doctorants de l’INRIA, afin de passer de la recherche à l’application. Les doctorants sont le carburant de la recherche et ce diplôme mérite d’être mieux reconnu par les entreprises. En effet, le titre de Doctorat, diplôme le plus élevé de l’enseignement supérieur, est aujourd’hui sous estimé par rapport au master dans les grilles salariales des entreprises. (Cf. rapport sur le doctorat (www.assemblee-nationale.fr/14/pdf/budget/plf2014/a1429-tIX.pdf) par Emeric Bréhier, Député.

La recherche c’est l’apport de connaissance et l’innovation la création de valeur avec pour objectif une application sur le marché. Aussi il faut mettre en place des mécanismes afin d’aider les chercheurs à identifier la valeur d’innovation. M. Raja Chatila, Directeur de recherche au CNRSsouligne qu’il y a un cloisonnement disciplinaire et pédagogique et un déficit de moyens mis en place. Ainsi, l’expérience des SATT (sociétés d’accélération du transfert de technologie – collaboration Université/Inserm/INRIA/CNRS) a montré qu’on pouvait dynamiser la maturation économique des projets de recherche, améliorer l’efficacité du transfert de technologies et créer de la valeur économique à travers la création de start up. De même l’INRIA soutient l’innovation dans les PME à travers différents modes de participations.

Une des plaies du système français c’est d’opposer la recherche et l’innovation. Pour Yves Poilane, Directeur de Télécom ParisTech, il est temps de former les étudiants à contre courant, de développer le « Divergent Thinking », car l’innovation est inachevée et permanente. L’esprit cartésien français représente un frein qui nous empêche d’aller vers des erreurs, dont naissent parfois des innovations (ex : le « Post It » résultat d’une colle non permanente,…). Le système d’évaluation dans l’enseignement doit tenir compte de la contribution de l’étudiant à l’innovation, à travers la réalisation de projets.

Les partenariats stratégiques avec les écoles de management et de design sont un des moyens de développer une approche pluridisciplinaire. C’est le cas de Télécom ParisTech avec HEC et cela concerne également la formation tout au long de la vie, avec l’acquisition de nouvelles compétences. Il faut créer des équipes d’étudiants à la fois pluridisciplinaires et mixtes, et ouvrir d’avantage l’accueil aux étudiants étrangers. La formation à l’innovation s’enrichit en effet de la diversité des cultures et des origines des étudiants, et de l’engagement plus important des jeunes filles dans les
carrières scientifiques. Il est important de créer des opportunités de rencontres entre les étudiants, les chercheurs et les entreprises dès les premières années préparatoires et au niveau de la thèse. Alain Denise, Université Paris-Sud souligne que le campus universitaire de Paris Saclay en est une illustration car il offre un fort potentiel pour créer des partenariats entreprises et écoles, en raison de leur proximité.

Le rôle de l’orientation et de l’apprentissage

Les professionnels du numérique dans leur ensemble regrettent que les Conseillers d’Orientation n’apportent pas suffisamment d’information aux jeunes sur les filières qui présentent de vraies opportunités de métiers, comme le numérique. Alors même que de nombreux jeunes s’orientent vers les universités sans réel projet professionnel, Guy Mamou-Mani, Président de Syntec Numérique affirme qu’il faut aujourd’hui être beaucoup plus proactif vis-à-vis des jeunes en matière d’orientation et les attirer vers des filières qui leur offrent des métiers d’avenir. C’est la responsabilité sociétale des entreprises et des pouvoirs publics aujourd’hui. Il en est de même pour l’apprentissage où l’arbitrage des pouvoirs publics encourage les jeunes à aller vers des formations à faible niveau, alors que les entreprises de l’informatique, du numérique et du digital offrent des opportunités aux étudiants du supérieur en apprentissage et embauchent
des Bacs+5 et des ingénieurs.


La place du numérique dans l’innovation et la compétitivité

Le numérique tient une place centrale dans l’innovation au cours de ces trente dernières années. Le numérique a développé la production de données de tous types et les outils informatiques pour exploiter ces données. Il a généré la numérisation du monde, bouleversant la vie quotidienne et professionnelle des citoyens. Ainsi, le numérique est au cœur de tous les outils permettant à l’être humain de répondre à 4 besoins fondamentaux : communiquer, apprendre, créer, se divertir.

Sur le plan économique, les Français ont une conscience aigue de la fragilité des entreprises et des économies, à travers la disparition d’un certain nombre d’industries et d’ETI – Entreprises de taille intermédiaire. On a assisté à l’explosion de la bulle Internet et à la montée en puissance des géants américains du net. Sur le plan des technologies, on assiste aujourd’hui à la convergence entre l’informatique, les télécoms et les médias.

Les défis à relever en matière de formation à l’innovation et à la recherche sont sociaux et économiques. Selon Alain Bravo, ancien directeur général de Supélec, Délégué général de l’Académie des Technologies, Ils portent notamment sur :

 la résistance à la prise de risque dans les aventures scientifiques, techniques et industrielles,

 l’insuffisance d’intégration européenne à l’horizon 2020.

Notre pays et ses ingénieurs ont une excellente réputation en matière d’innovation dans le secteur du numérique, mais le fait que les retombées finales au niveau économique ne soient pas à la hauteur de notre réputation, implique qu’il y ait des changements à apporter dans la distribution des rôles des acteurs concernés (état, collectivités, enseignement supérieur, entreprises) pour favoriser l’innovation.

NOTE/ A propos de l’Association Pasc@line

Créée en 2006, elle réunit 75 établissements d’enseignement supérieur dispensant des formations du numérique et 1.200 entreprises du secteur du numérique regroupées autour de Syntec Numérique et du CINOV-IT. Elle a pour mission de développer l’attractivité des formations qui ouvrent sur les métiers du numérique, auprès des jeunes générations, garçons et filles. L’Association est un lieu unique d’échanges entre formateurs et professionnels du numérique. www.assopascaline.fr

Au sujet de Yan de Kerorguen

Ethnologue de formation et ancien rédacteur en chef de La Tribune, Yan de Kerorguen est actuellement rédacteur en chef du site Place-Publique.fr et chroniqueur économique au magazine The Good Life. Il est auteur d’une quinzaine d’ouvrages de prospective citoyenne et co-fondateur de Initiatives Citoyens en Europe (ICE).

Catégorie(s)

Le Magazine, Sciences et société

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