Alors que notre système de santé semblé fragilisé, les Français et le système de santé sont en train de prendre conscience d’un changement inévitable. C’est ce que révèle le Baromètre Santé 2013 Deloitte / Harris Interactive. 49% des Français accepteraient la consultation et la prescription par internet. 35% des Français sont prêts à augmenter leurs cotisations à l’Assurance Maladie. Un quart d’entre eux est prêt à sortir du système de base pour une assurance maladie 100% privée

Réalisée auprès de 2 000 Français, l’étude révèle de nombreux paradoxes. Elle met en lumière une maturité naissante quant à la nécessité de revoir le système de santé tel qu’il existe hors du schéma traditionnel. Déficit des hôpitaux, modification du parcours de santé, généralisation de la complémentaire santé (ANI), défiance vis-à-vis des organes de régulation du médicament, réforme de l’Etat, incidents médicaux, constituent un terreau favorable à une remise en question du système et à l’évolution des mentalités.

Nonobstant un sentiment de détérioration du fonctionnement (74%) et de la qualité du service médical (68%), ils expriment leur satisfaction à l’égard du système de santé. En effet, 71% des Français estiment que l’accès aux soins médicaux est facile et que les remboursements de leur complémentaire sont satisfaisants (84%). Ils sont cependant 63% à juger que le fonctionnement de l’Assurance Maladie et sa qualité se sont dégradés au cours de la dernière année quand seulement 54% déclarent être satisfaits par le niveau de remboursement. De plus, 76% de la population française a le sentiment que les dépenses de santé à sa charge ont augmenté depuis un an. Les prix de certains actes médicaux et des médicaments sont perçus trop élevés par respectivement 87% et 76% des Français.

Moins d’un tiers (31%) s’estiment prêts à faire face au coût des soins de santé quand 39% perçoivent un impact significatif des mesures de déremboursement. Néanmoins l’évolution du coût de la complémentaire santé est à prendre en considération puisque 81% des Français jugent qu’il a augmenté au cours des cinq dernières années. La fidélisation à une complémentaire repose en premier lieu sur les avantages financiers pour les assurés, et en second lieu sur les services, la prévention arrivant en tête.

Une majorité de Français est prête à faire des efforts pour réduire le montant des frais de santé supportés par leur mutuelle soit en ne consultant que des médecins ne pratiquant pas de dépassement d’honoraires (pour 59%), soit en fréquentant dans la mesure du possible un centre de soins (pour 52%). Autre changement perceptible dans le comportement des Français vis-à-vis de la santé: ils sont 69% à déclarer avoir systématiquement recours aux génériques dès qu’on leur propose et 68% accepteraient d’avoir recours à l’automédication pour garantir un meilleur niveau de remboursement.

« Certaines mesures récentes comme le déremboursement de médicaments, ou la taxation des assureurs complémentaires qui a induit une hausse des cotisations, ont contribué à donner aux Français un sentiment de détérioration du système de santé alors que le reste à charge des ménages en France est un des plus faibles des pays de l’OCDE » Yves Jarlaud, Associé Conseil responsable du secteur Santé et Sciences de la Vie chez Deloitte.

Sur le plan de l’information, les Français ont une méconnaissance de l’ensemble des services proposés par les complémentaires santé. 83% des personnes interrogées estiment avoir une couverture adaptée de la part de leur mutuelle. En revanche, un quart des répondants n’est pas intéressé par la personnalisation de la couverture de sa complémentaire santé. Ils ont globalement une bonne connaissance de leur complémentaire santé : 78% d’entre eux sont capables de donner une estimation de leur cotisation mensuelle qu’ils évaluent en moyenne à 107 euros. Pour 15% des assurés, la combinaison hospitalisation / dentaire / optique représente les postes à conserver en priorité.

« Les Français prennent conscience que la santé est un bien à préserver qui a un coût. Nous percevons bien à travers l’étude qu’ils sont en train d’acquérir une certaine maturité quant aux enjeux de la santé et le besoin de changer de comportement et de système tout en conservant quelques fondamentaux tel que la participation à l’effort collectif, explique Jean-François Poletti, Associé Conseil Santé spécialiste des Assurances et Mutuelles. Les Français espèrent vivre en pleine santé jusqu’à 72 ans. Les actions de prévention prennent de l’importance et deviennent même déterminantes pour les Français. Ils sont plus de la moitié à estimer qu’elles peuvent retarder l’âge d’entrée en dépendance. Des services de ce type sont attendus de la part des mutuelles par 38% d’entre eux» conclut-il.

L’étude révèle un autre enjeu pour les assureurs : malgré leur sensibilisation grandissante aux actions de prévention, 60% des Français ne savent pas si leur complémentaire santé propose ce type de prestation. Or 81% attendent des professionnels de santé une participation active dans la mise en place de politiques de prévention et 68% estiment que les offres de prévention devraient être couvertes par l’assurance maladie au même titre que les médicaments.

Les Français prennent conscience des efforts à fournir pour le financement de la santé. 72% d’entre eux pensent que des réductions de coût sont encore possibles dans le système de santé tout en maintenant la qualité des soins et la sécurité des patients. L’équilibre financier des hôpitaux est un enjeu important. Pour 76% d’entre eux il est primordial de le restaurer. Nous constatons également que 53% des personnes interrogées sont pour l’ouverture de grands centres hospitaliers multi-compétents. Pour autant, 65% restent attachés au maintien des petits centres de proximité.

Le partage de données informatiques de santé remporte une large majorité d’opinion favorable (78%). Les Français y voient un facteur d’amélioration de la qualité du traitement du patient, ainsi qu’une aide à une prise en charge plus rapide et à une meilleure efficacité administrative. Près d’un Français sur deux (49%) accepterait par ailleurs la consultation et la prescription à distance.

En outre, un gros tiers (35%) des personnes interrogées déclarent être prêtes à augmenter leurs cotisations à l’Assurance Maladie pour préserver le niveau de remboursement de leur santé. Et plus d’un quart des Français se dit prêt à ne plus adhérer au système de base pour une assurance maladie 100% privée.

Dans ce contexte, les Français estiment que le gouvernement doit en priorité contrôler et limiter les honoraires libres (41%) et refondre le système dans son ensemble (37%). Dans cet effort de recherche d’équilibre, ils souhaitent voir tous les acteurs s’engager de manière coordonnée au côté des pouvoirs publics, y compris les industriels du médicament (73%) et les professionnels de santé (72%)

« Des verrous commencent à sauter. L’étude démontre qu’un mouvement est en marche vers une plus grande maturité des Français concernant le système de santé et la nécessité de le reformer. Il s’agit là d’une prise de conscience, l’Etat n’est plus considéré comme la solution unique. Les Français souhaitent être acteurs de leur santé et sont prêts à davantage contribuer au système de santé et à son évolution» conclut Michel Sebbane, Associé Conseil Secteur Public Santé et Social chez Deloitte.

Méthodologie

Ce rapport de Deloitte/ Harris Interactive s’appuie sur les résultats d’une étude quantitative réalisée en ligne du 7 au 18 février auprès d’un échantillon de 2000 répondants représentatif des Français de 18 ans et plus en termes de sexe, d’âge, de région, de taille d’agglomération et de revenu annuel brut du foyer selon la méthode des quotas et redressement.

Au sujet de Yan de Kerorguen

Ethnologue de formation et ancien rédacteur en chef de La Tribune, Yan de Kerorguen est actuellement rédacteur en chef du site Place-Publique.fr et chroniqueur économique au magazine The Good Life. Il est auteur d’une quinzaine d’ouvrages de prospective citoyenne et co-fondateur de Initiatives Citoyens en Europe (ICE).

Catégorie(s)

ETUDE, Le Magazine

Etiquette(s)

,