Thierry Jeantet

Rompre les frontières de la finance d’autrefois (c’est à dire d’hier au soir), traverser les frontières naturelles ou instituées, c’est sans doute ce qu’il faut faire pour faire circuler les moyens financiers et l’épargne citoyenne vers les projets durables. Une Banque des Initiatives Citoyennes à dimension internationale devrait stimuler cette orientation.

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La financiarisation de l’économie a créé des entreprises figées et dogmatiques dans lesquelles c’est celui qui finance qui décide. Ainsi dans l’actionnariat, on pense d’abord à rémunérer ceux qui sont au capital, les salariés et consommateurs viennent au second plan. La course au profit se fait au détriment des salaires que les gouvernements et les entreprises n’ont pas su augmenter pour équilibrer le partage de la valeur ajoutée. Au détriment aussi des prix qui ne sont guère régulés. Au détriment enfin de l’innovation qui n’est pas valorisée.

Ce constat milite pour transformer la façon dont la finance gère sa relation avec les gens qui travaillent et qui innovent. Les banques solidaires fournissent un modèle permettant de corriger ces défauts du système financier traditionnel. Loin de rejeter le marché, elles se caractérisent par une présence simultanée dans le domaine marchand et non-marchand.

Depuis quelques années, le financement solidaire a permis à nombre d’initiatives de particuliers ou d’entreprises de développer des services, des biens, des marchés, utiles à la société. Le projet est collectif et citoyen. Il n’appelle pas à l’accumulation du capital mais au souci du partage. Il n’est pas prisonnier de la Bourse. Une de ses caractéristiques est d’être imaginatif.

Les banques coopératives et mutuelles ont ainsi, à travers des produits d’épargne solidaire, des fonds communs de placement solidaire, des produits de partage et des prêts citoyens, offert une voie à de nombreuses associations ou organisations humanitaires pour les aider à accomplir des projets sociaux, environnementaux ou humanitaires. Ainsi, ces Banques coopératives, mutualistes ou alternatives ont vocation à soutenir localement les initiatives entrepreneuriales, solidaires, environnementales et à créer des outils communs pour financer les projets continentaux et internationaux. Les Etats et les grandes banques internationales pourraient dans ce contexte nouer des partenariats avec ces acteurs de la finance solidaire.

Dans cette perspective, une Banque internationale des Initiatives Citoyennes, à cheval entre la banque traditionnelle et la banque solidaire, aurait pour vocation de financer les initiatives locales issues de la société civile et identifiés comme socialement utiles. Cette banque d’initiative devrait recevoir le droit d’émettre des obligations venant de toutes parts, de l’agriculteur du Bénin ou de l’habitant de Bruxelles.

* Ce texte est l’une des dix propositions contenues dans le livre édité par les Editions Lignes de Repères en collaboration avec Place Publique. « Sociétale démocratie: un nouvel horizon » (par Thierry Jeantet et Yan de Kerorguen)

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