Des chercheurs en génétique du Centre médical universitaire de Leyde, ont annoncé au printemps dernier avoir réalisé le premier séquençage complet du génome d’une femme.  La carte du génome humain – environ trois milliards de lettres représentant le code ADN -, avait été intégralement établie en 2003 par le Consortium international pour le séquençage du génome humain, avec un degré de précision estimé à 99,99%. Rappelons que le génome regroupe l’ensemble des gènes qui caractérisent l’espèce, détermine les spécificités de chaque individu y compris  ses prédispositions à certaines maladies.

Il y a quelques semaines, ce sont des chercheurs  de plusieurs universités  (notamment université de Californie, de Chicago et de Lausanne) qui ont établi une carte européenne des variations génétiques des européens (1). Cette carte de l’Europe permet d’y voir plus clair sur l’héritage génétique et  la compréhension de certaines maladies, l’idée étant de favoriser l’épidémiologie génétique  et la pharmaco-génétique. Un des partenaires de cette étude était le laboratoire Glaxo Smith Kline. Cette avancée a été rendue possible par la baisse du coût du séquençage du génome.

Aujourd’hui la bataille est  rude sur ce terrain. Permettre un séquençage plus rapide et moins coûteux du génome humain est un des grands défis de l’avenir. A la clef, faire avancer la médecine en la rendant plus personnalisée, tenant compte du génome de chacun. Et les effets d’annonce se sont multipliés car en l’espace de quelques mois, plusieurs sociétés et groupes de chercheurs ont rivalisé dans ce domaine. En première ligne,  George Church  – qui dirige le Centre of computational genetics à Harvard Medical School de Boston, initiateur  du Human Genome Project   -avait déjà développé une première technologie de séquençage dans les années  80. Cette fois la nouvelle technologie a été développée en s’appuyant sur une philosophie « open source », avec la volonté d’un relativement faible coût de production, puisqu’elle coûterait 150 000 dollars, soit entre  un tiers ou un dixième du prix des machines actuelles.  Pour George Church un accès plus facile au séquençage du génome est un élément essentiel pour arriver à une médecine personnalisée préventive sur mesure pour chacun. Plus vite et moins cher ! Le premier décodage du génome humain, en 2001, avait pris plus d’une décennie et coûté 300 millions de dollars environ. Il y a près d’un an, une équipe chinoise annonçait y être parvenu pour un million de dollars. Et coup sur coup, lors de ces derniers mois, deux sociétés californiennes Illumina  et Applied Biosystems ont annoncé y être parvenues  pour 100 000 dollars puis 60 000 dollars et en quelques semaines (six environ). Du coté de Helicos Biosciences  on vient d’annoncer la mise au point d’une nouvelle machine , le Heliscope, qui peut lire directement  la séquence d’une seule molécule et se targue d’être la plus rapide du monde (2).

Une sorte de course à l’échalote ! Des enjeux financiers énormes se profilent,  alors que la science du décodage commence à intéresser de près les marchés financiers. Des critiques se sont élevées mettant  en question la qualité de leurs décodages, et ou des résultats tardant à être publiés. A quand le génome  décrypté pour 1000 dollars,  s’interrogeait récemment une revue scientifique ? D’ici trois ans ?   Deux autres sociétés Complete Genomics and BioNanomatrix, collaborent pour mettre au point une nouvelle  méthode  qui non seulement ferait baisser le coût du séquençage mais permettrait  à terme de lire une séquence complète en un jour de travail. La plupart des technologies existantes détectent la séquence d’ADN  une lettre à la fois, là  s’agit  de détecter des « mots » entiers composés de cinq lettres, et de développer une technologie qui lira simultanément la séquence de plusieurs génomes. 1000 dollars, c’est aussi un prix psychologique qu’une proportion importante d’américains serait prête à payer  pour un service médical personnalisé. Mais l’accès à un génome individuel n’est pas sans soulever plusieurs questions éthiques comme  les risques de discrimination par  les compagnies d’assurance ou par les employeurs. Il faudra alors que  les gouvernements en  régulent l’utilisation, par exemple en garantissant des dispositifs d’assurance-santé indépendants de toute prédisposition génétique à une maladie.

(1)Techlonology Review 3 septembre 2008

(2)Techonology Review juillet-août 2008

www.technologyreview.com

Au sujet de Estelle Leroy

Estelle Leroy-Debiasi est journaliste professionnelle, Diplômée en Economie, ex rédactrice en chef du quotidien économique La Tribune. Elle contribue régulièrement au site ElCorreo, site de la diaspora latinoamericaine.

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