« Ni victimes, ni coupables… fières d’être putes » ! Tel est le slogan des Putes, nouveau groupe activiste composé de prostitués, femmes et « transpédégouines », luttant contre la « putophobie ». Point d’orgue de ce combat, la Pute-pride organisée le 18 mars 2006 à Paris.

Créé suite à la conférence européenne des sex-workers (travailleurs du sexe) de Bruxelles, qui a eu lieu du 15 au 17 octobre 2005 (1), le mouvement « Les Putes » affirme la fierté d’appartenir à une communauté « Pute ». Fierté, mais aussi conviction de la nécessité d’une démarche activiste afin de faire reconnaître leur métier et leurs droits humains.

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Très remontées contre la classe politique, « Les Putes » veulent la fin de ce qu’elles nomment « putophobie » et qui les maintient dans un statut de délinquantes ou de victimes. « Contre la putophobie de Sarkozy ou de ceux qui veulent nous abolir, nous répondons par la fierté, proclament « Les Putes » sur leur site. Nous sommes fières d’être des travailleuses du sexe. Nous sommes en colère contre tous ceux qui veulent nous abolir. Nous ne supportons pas le discours abolitionniste qui est à notre égard culpabilisant, victimisant, méprisant, et tout simplement stigmatisant ».

Fierté et revendications

C’est pour afficher leur fierté, mais aussi porter haut et fort leurs revendications sociales, que la Pute-Pride a été organisée le samedi 18 mars 2006 (voir photos), à l’occasion du troisième anniversaire de la loi sur la sécurité intérieure mise en place par Nicolas Sarkozy pour combattre la prostitution. Loi qui sanctionne notamment le racolage passif par 2 mois de prison et 3750 € d’amendes. A noter qu’une infime minorité de prostitués prend le risque d’utiliser l’article 76, autre mesure phare de la loi, qui garantit des papiers et une protection en échange de la dénonciation des proxénètes. « L’article 76 est insuffisant en matière de protection et d’assistance des personnes », dénonce Amnesty international dans son dernier rapport, Les violences faites aux femmes en France (Edition Autrement).

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« Nous ne vendons pas nos corps mais proposons des services sexuels, c’est notre métier et nous le faisons bien : nous sommes des professionnelles du sexe », déclarent les Putes dont les revendications sont d’ordre politique, sociale et sanitaire.

Elles demandent, tour à tour, l’abrogation de la loi Sarkozy, la légalisation de la prostitution en France, la reconnaissance de droits sociaux, l’égalité des droits avec les autres travailleurs, la pénalisation de toutes les discriminations putophobes et l’intégration de la putophobie dans les sujets pris en considération par la HALDE (Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité), un tarif minimum pour les passes, le libre choix du statut et des conditions de travail – profession libérale, statut salarié, etc. -, la création d’une Journée nationale en mémoire des putes persécutées, assassinées et déportées, et des actions ciblées de prévention des Infections sexuellement transmissibles (IST), du sida et des hépatites.

Un site Internet

Bref, les Putes sont remontées et entendent bien le faire savoir. Leur site en est la preuve, regorgeant d’informations historiques, de conseils à l’usage de leurs clients, de mises en garde aussi contre celles et ceux qui au nom de la « bonne cause » chercheraient à les juger ou à faire abolir leur gagne-pain. En fond sonore, la chanson de Gloria Gaynor I am What I am accompagne le lecteur dans ses déambulations, une chanson comme un programme…

« I am what I am

I am my own special creation

So come take a look

Give me the hook

Or the ovation

It’s my world

That I want to have a little pride

My world

And it’s not a place I have to hide in

Life’s not worth a dam

Till I can say

I am what I am »

(1) La conférence de Bruxelles a débouché sur la rédaction d’un manifeste et d’une « déclaration des droits des travailleuses du sexe » (disponibles sur le site www.lesputes.org).

Photos : Jojo (retrouvrez l’ensemble des photos de la manifestation sur www.oeillades.net, site éditorial et photographique animé par des habitants du 17e arrondissement de Paris)

Au sujet de Anne Dhoquois

Anne Dhoquois est journaliste indépendante, spécialisée dans les sujets "société". Elle travaille aussi bien en presse magazine que dans le domaine de l'édition (elle est l'auteur de plusieurs livres sur la banlieue, l'emploi des jeunes, la démocratie participative). Elle fut rédactrice en chef du site Internet Place Publique durant onze ans et assure aujourd'hui la coordination éditoriale de la plateforme web Banlieues Créatives.

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