Le 18 janvier dernier, l’Observatoire de la Vie étudiante (OVE) a publié les premiers éléments de son enquête sur les conditions de vie des étudiants en 2010 (la dernière datait de 2006). Avec son échantillon représentatif de 33 000 étudiants des universités, des classes supérieures de lycées et d’écoles spécialisées, l’étude permet d’en savoir plus sur leurs ressources, leurs conditions de logement et d’accès aux soins. Un constat alarmant…

Une démocratisation de l’enseignement supérieur ?

Au contraire !
Dans l’ensemble des formations de l’enseignement supérieur, les enfants de cadres et de professions intellectuelles sont surreprésentés par rapport à leur proportion dans la population active. La moitié des inscrits en écoles d’ingénieurs, de management ou encore en classes préparatoires en font partie. Une tendance qui s’est amplifiée ces dernières années puisque la part des enfants issus des classes populaires est passée de 35 % à 31 % entre 2006 et 2010 et ceux des classes supérieures de 32 % à 36 %. Chiffre plus symptomatique encore, chez les enfants d’ouvriers ou d’employés de 18 à 24 ans, seuls 27% sont toujours étudiants alors que 53% sont entrés dans le monde du travail.

Un étudiant travaille sur ses cours 37 heures par semaine en moyenne… lorsqu’il le peut.

Les jeunes qui déclarent étudier le plus sont les élèves des classes préparatoires aux grandes écoles. Rien de très surprenant si l’on remet ce chiffre dans son contexte. En effet, les étudiants de ces écoles provenant majoritairement de milieux aisés, ils n’ont pas à exercer d’activité rémunérée pour subvenir à leurs besoins. Car, oui, plus du tiers (35%) des jeunes scolarisés dans l’enseignement supérieur travaille pendant leur année scolaire. Les raisons avancées sont généralement le besoin de financer ses études et la nécessité de ce travail pour vivre. Et ce n’est pas avec les 619 euros mensuels qu’ils gagnent en moyenne que leur situation s’améliorera fortement. Si l’on y ajoute les stages et les jobs d’été, ils ne sont que 27% à ne pas avoir effectué d’activité rémunérée durant l’année !

Difficile de continuer ses études sans l’aide des parents…

Si on veut arriver au terme de sa formation universitaire, il faut souvent remettre ses envies d’indépendance à plus tard. En effet, un tiers des étudiants vivent bon gré mal gré au domicile parental. A contrario, rares sont ceux qui bénéficient d’une résidence universitaire. Avec 10% d’étudiants bénéficiaires, la situation est identique à celle observée en 2006 ; preuve s’il en est que le problème du logement étudiant n’a toujours pas été pris à bras le corps. Et, lorsqu’ils font le choix de quitter le domicile familial, c’est à ces derniers de se serrer la ceinture. Plus de la moitié des étudiants (54 %) sont aidés par leurs parents et cette aide s’élève en moyenne à plus de 200 euros par mois pour les enfants d’ouvriers ou d’employés ; une vraie cagnotte pour une famille aux revenus modestes.

8% des étudiants n’ont pas de mutuelle

Loin des clichés, cette étude permet de montrer que l’image de l’étudiant fêtard et glandeur n’a pas lieu d’être. Tout d’abord, car son temps de travail universitaire, combiné fréquemment à un emploi, est au moins égal à celui des salariés. Et puis, parce que l’Observatoire de la Vie Étudiante relève que 68% des étudiants consomment de l’alcool moins d’une fois par semaine et seul 2% en consomme quotidiennement. Par ailleurs, ils ne négligent pas leur santé puisque 76% des étudiants ont consulté un médecin généraliste durant les 6 mois précédant l’étude. Malheureusement, l’accès aux soins n’est pas une évidence pour tous car 8% des étudiants déclarent ne pas avoir de mutuelle.
Si les conditions de vie de la jeunesse sont le thermomètre de la société, une remise en question de la politique hexagonale sur ce sujet est nécessaire avant que ce thermomètre n’explose.

Au sujet de Yan de Kerorguen

Ethnologue de formation et ancien rédacteur en chef de La Tribune, Yan de Kerorguen est actuellement rédacteur en chef du site Place-Publique.fr et chroniqueur économique au magazine The Good Life. Il est auteur d’une quinzaine d’ouvrages de prospective citoyenne et co-fondateur de Initiatives Citoyens en Europe (ICE).

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ETUDE, Le Magazine

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