Au lendemain d’une crise aux lourdes conséquences économiques et sociales pour l’Europe, face à la concurrence des pays émergents et aux défis environnementaux de plus en plus aigus, la stratégie « Europe 2020 », présentée par la Commission européenne en mars et adoptée par les Etats membres en juin dernier, a pour ambition de trouver les moteurs d’une croissance et d’une compétitivité indispensable à l’Europe, fondée sur une coordination renforcée des politiques économiques.
Une conférence organisée le 10 septembre au Conseil économique, social et environnemental entend stimuler le débat afin d’impliquer tous les acteurs au niveau national.

Les 5 grands chantiers de la stratégie d’Europe 2020

1er Objectif phare : bâtir un nouveau modèle économique européen et créer de nouvelles sources de croissance pour faire de l’UE une économie intelligente, durable et inclusive.

Parce que la prévention coûte moins chère que la réparation, l’Europe doit tirer des leçons de la crise violente qu’elle a subie sur le plan économique, financier et politique. A cet effet, Michel Barnier, Commissaire européen en charge du marché intérieur et des services, a déclaré : « Nous
devons renforcer le marché unique et renforcer la confiance dans l’Europe. Nous voulons parler et trouver ensemble le chemin d’une nouvelle culture des risques; d’une nouvelle culture de la gestion des crises et de la prévoyance (…). Mon ambition est de faire en sorte que demain nous puissions en Europe gérer une crise. Peut être avec plus d’Europe que lors de la crise dont nous sortons. »

Pour lutter contre la crise, des mesures exceptionnelles ont été mises en place par les
gouvernements (baisse des taux d’intérêt, soutien massif aux banques…). Mais parce qu’on ne peut supporter indéfiniment un niveau élevé de dette publique, la réalisation des objectifs d’Europe 2020 doit se fonder sur une stratégie crédible de sortie de crise au niveau des politiques budgétaires et monétaires, d’une part, et des aides directes des gouvernements aux secteurs économiques – en particulier le secteur financier – d’autre part. L’enchaînement de ces différents aspects de la sortie de crise est essentiel. Un renforcement de la coordination des politiques économiques, notamment dans la zone euro, devrait permettre de progresser vers une sortie mondiale de la crise.

La stratégie Europe 2020 expose une vision de l’économie sociale de marché européenne pour la
décennie à venir et repose sur trois secteurs prioritaires interdépendants et se renforçant
mutuellement :

 une croissance intelligente, en développant une économie fondée sur la connaissance et
l’innovation;

 une croissance durable, en promouvant une économie sobre en carbone, économe en
ressources et compétitive;

 une croissance inclusive, en encourageant une économie à fort taux d’emploi favorisant la
cohésion sociale et territoriale.

« Une stratégie numérique pour l’Europe » est la première des 7 initiatives phares prises à avoir été présentée par la Commission. Elle vise à accélérer le déploiement de l’Internet à haut débit afin que les entreprises et les ménages tirent parti des avantages d’un marché numérique unique. En effet, cette ambitieuse stratégie numérique permettrait de contribuer notablement à la croissance
économique de l’UE et de faire profiter tous les secteurs de la société des avantages de l’ère
numérique.

2ème objectif phare: « Une politique industrielle à l’ère de la mondialisation », qui vise à améliorer l’environnement des entreprises, en particulier des PME (particulièrement touchées par la crise), et à soutenir le développement d’une assise industrielle forte et durable, à même d’affronter la concurrence mondiale.

« En période de crise, les investissements stratégiques sont essentiels pour une croissance durable à long terme. La sécurité est une condition sine qua non pour les entreprises, et l’espace recèle des possibilités infinies. Ce type de recherche est au coeur du renouveau industriel dont l’Europe a besoin. Il démontre la valeur ajoutée, pour l’innovation, des investissements européens dans la technologie haut de gamme, qui nous permettront de relever avec succès les défis majeurs auxquels nous sommes confrontés, » a précisé le vice-président de la Commission européenne Antonio Tajani, commissaire à l’industrie et à l’entrepreneuriat.

A ce titre, la Commission a entamé des négociations en vue de la signature de contrats de recherche d’une valeur de 324 millions EUR avec les 108 consortiums de recherche qui ont été sélectionnés dans les domaines de l’espace et la sécurité. En tant qu’acteur mondial et grande puissance spatiale, l’UE mise sur la recherche dans les domaines de l’espace et de la sécurité pour une protection des frontières efficace et une surveillance accrue de l’environnement. C’est pourquoi le développement du système de surveillance mondiale de l’environnement et de la sécurité (GMES) continue d’être encouragé par des financements.

3ème objectif phare : « Une Union de l’innovation », qui vise à améliorer les conditions cadres et l’accès au financement pour la recherche et l’innovation, de manière à renforcer le processus d’innovation et à doper les niveaux d’investissement dans toute l’Union.

Pour une sortie de crise intelligente, l’investissement dans la recherche et l’innovation est
fondamental. L’objectif de cette initiative est d’améliorer les conditions de la recherche et
développement, afin de porter à 3 % du PIB le niveau cumulé des investissements publics et privés dans ce secteur.

Exemple d’investissements :

 Plus de 6,4 milliards d’euros vont être investis par la Commission européenne dans la recherche et l’innovation pour une croissance intelligente et la création d’emplois, soit le plus grand investissement jamais réalisé par l’Europe dans la recherche et l’innovation. Près de 16 000
participants issus d’organismes de recherche, d’universités et de l’industrie, dont environ 3 000 PME, pourront ainsi bénéficier de ce financement. Leurs projets devront porter sur les grands défis économiques et sociétaux : changement climatique, sécurité énergétique et alimentaire, santé et vieillissement de la population. Cette enveloppe financière vise à stimuler l’économie et devrait
permettre la création de plus de 165 000 emplois.

4ème objectif phare: « Une stratégie pour la formation, l’éducation et les nouveaux emplois qui vise à moderniser les marchés du travail, en favorisant la mobilité professionnelle et le développement de compétences tout au long de la vie, afin d’améliorer la participation au marché du travail et d’établir une meilleure adéquation entre l’offre et la demande.

« Jeunesse en mouvement » vise à renforcer les performances des systèmes éducatifs et à consolider l’attractivité internationale de l’enseignement supérieur européen.

Priorité : une croissance inclusive, à travers un fort taux d’emploi favorisant la cohésion sociale et
territoriale.

Parce qu’une économie à fort taux d’emploi favorisera la cohésion économique, sociale et
territoriale, Europe 2020 ambitionne de moderniser les marchés du travail et permettre aux
personnes de développer leurs compétences tout au long de leur vie.
L’un des objectifs principaux est de porter à 75 % le taux d’emploi des femmes et des hommes âgés
de 20 à 64 ans, notamment grâce à une plus grande participation des jeunes, des travailleurs âgés et des travailleurs peu qualifiés, ainsi qu’à une meilleure intégration des migrants légaux.

L’éducation en chiffre

 1/4 des élèves maîtrise mal la lecture.

 Un jeune sur sept quitte l’éducation ou la formation prématurément.

 80 millions de personnes sont peu ou non qualifiées,

 Alors que 16 millions de nouveaux emplois exigeront des qualifications élevées d’ici à 2020.

 Moins d’une personne âgée de 25 à 34 ans sur trois est titulaire d’un diplôme universitaire alors que ce taux est de 40 % aux États-Unis et de 50 % au Japon.

Exemple de projets :

Europe 2020 veut également renforcer la performance des systèmes éducatifs, améliorer les niveaux d’éducation (réduction du taux d’abandon scolaire) et faciliter l’entrée des jeunes sur le marché du travail via l’initiative « Jeunesse en mouvement », destiné à rendre les possibilités d’éducation et de formation et de mobilité accessibles à tous les jeunes.
En matière d’enseignement supérieur, l’objectif est de renforcer la performance et l’attractivité internationale de ces établissements d’accroître la qualité globale de tous les
niveaux d’éducation et de formation au sein de l’UE, combinant à la fois excellence et équité.

Par ailleurs, un sommet social tripartite avec les partenaires sociaux européens, la Commission
européenne ainsi que les Premiers ministres et les ministres chargés de l’emploi de la «troïka»
(composée de l’État qui assure la présidence du Conseil européen et des deux États qui lui
succéderont immédiatement) se tiendra au moins une fois par an, avant le Conseil européen de
printemps, pour permettre un échange de vues et réfléchir aux moyens de sortir l’Europe de la crise actuelle.

5ème objectif phare : « Une Europe économe en ressources et tournée vers l’environnement », qui vise à découpler croissance économique et utilisation des ressources, en limitant les émissions de carbone de notre économie, en recourant davantage aux sources d’énergie renouvelables, en modernisant notre secteur des transports et en encourageant l’efficacité énergétique.

Priorité : une croissance durable, assise sur une économie plus efficace dans l’utilisation des
ressources, plus verte et plus compétitive.

Objectifs : le changement climatique et la pression sur les ressources appellent des mesures
énergiques. Ainsi, les objectifs « 20/20/20 » de l’Union en matière de climat et d’énergie doivent
être atteints :

 Réduire les émissions de gaz à effet de serre de 20 % par rapport aux niveaux de 1990 (voire de
30 % dans le cadre d’un accord mondial global) ;

 Faire passer à 20 % la part des sources d’énergie renouvelable dans notre consommation finale
d’énergie;

 S’acheminer vers une augmentation de 20 % de notre efficacité énergétique.
Si ces objectifs sont atteints, près de 60 milliards d’euros d’importations de gaz et de pétrole
pourraient être économisés à l’horizon 2020. Il s’agit non seulement d’économies financières, mais de sécurité énergétique.
Le simple fait d’atteindre l’objectif de l’UE visant à utiliser 20 % d’énergie provenant de sources renouvelables peut permettre de créer plus de 600 000 nouveaux emplois dans l’UE. Si l’on ajoute l’objectif de 20 % d’efficacité énergétique, ce sont plus d’un million de nouveaux emplois qui sont en jeu.

Les grands objectifs mesurables définis par le Conseil européen

 1. Faire passer le taux d’emploi de la population âgée de 20 à 64 ans de 69 % à au moins 75 %.

 2. Investir 3% du PIB de l’UE dans la R&D.

 3. Atteindre les objectifs en matière de climat et d’énergie : réduction des émissions de gaz à effet de serre d’au moins 20 % par rapport aux niveaux de 1990, accroître la part de l’énergie renouvelable et augmenter et l’efficacité énergétique.

 4. Améliorer les niveaux d’éducation: réduire à 10% le taux d’abandon scolaire (actuellement de 15%) et porter à 40% la proportion des personnes diplômées de l’enseignement supérieur

 5. Favoriser l’inclusion sociale et réduire de 25 % le nombre d’Européens vivant au-dessous des seuils de pauvreté nationaux, afin de faire sortir 20 millions de personnes de la pauvreté.

Au sujet de Yan de Kerorguen

Ethnologue de formation et ancien rédacteur en chef de La Tribune, Yan de Kerorguen est actuellement rédacteur en chef du site Place-Publique.fr et chroniqueur économique au magazine The Good Life. Il est auteur d’une quinzaine d’ouvrages de prospective citoyenne et co-fondateur de Initiatives Citoyens en Europe (ICE).

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