Que ce passe-t-il lorsque l’on marche dans la rue sans regarder devant soi ? Le cerveau minimise les dégâts.

Des chercheurs du Centre de recherche Cerveau et Cognition (CNRS/Université Paul Sabatier) viennent de montrer que quand on regarde sur le côté, l’activité des neurones augmente pour rendre « plus visibles » les objets en face de nous.

Dans le cerveau, les informations provenant du champ visuel sont traitées différemment, selon qu’il s’agit de « vison centrale » ou de « vision périphérique ». La vision centrale correspond au centre du champ visuel, dans la direction où se porte le regard et dans un secteur de quelques degrés d’angle autour de cette direction. La vision périphérique correspond à ce qui se trouve en dehors, sur les côtés.

La vision centrale est, à bien des égards, plus performante que la vision périphérique. Cela fait partie de notre expérience quotidienne. Nul ne mettra en doute le fait que la meilleure façon d’éviter les obstacles qui peuvent se dresser sur notre chemin est de regarder où l’on va, droit devant, et non sur le côté, du coin de l’œil. Mais que ce passe-t-il lorsque l’on regarde sur le côté ? Va-t-on vraiment à la catastrophe si un obstacle se présente ?

Pas si sûr, répondent les neurophysiologistes du Centre de recherche Cerveau et Cognition (CNRS/Université Pau l Sabatier). Lorsque le regard se détourne, la région de l’espace située devant le corps est prise en charge par la vision périphérique. Mais, de façon inattendue, les scientifiques, Jean-Baptiste Durand, Yves Trotter et Simona Celebrini, ont mis en évidence un mécanisme qui semble garantir un traitement privilégié de cette zone.

Ils montrent que lors d’un changement de direction du regard, de 10° vers la droite par exemple, les neurones codant une région localisée à 10° sur la gauche dans le champ visuel (région qui coïncide alors avec la zone droit devant) auront une activité maximale. De façon générale, lorsque le regard est excentré, les neurones de la vision périphérique dont le champ récepteur se rapproche de la zone droit devant voient leur activité augmenter. Au contraire, ceux dont le champ récepteur s’éloigne de cette direction présentent une diminution d’activité. Grâce à ce mécanisme, les objets situés droit devant seraient « plus visibles », même en vision périphérique.

Ces résultats ont été obtenus par la mesure de l’activité électrique des neurones chez le maca! que. Actuellement, les chercheurs mènent des tests de comportement chez l’homme, afin de confirmer la corrélation entre l’augmentation de l’activité électrique et la capacité de détection accrue des objets situés dans la zone droit devant. Les résultats préliminaires vont dans ce sens.

Ces travaux pourraient ouvrir de nouvelles voies thérapeutiques, notamment pour la rééducation de personnes qui, suite à une dégénérescence maculaire liée à l’âge, ne peuvent se fier qu’à leur vision périphérique.

Au sujet de Yan de Kerorguen

Ethnologue de formation et ancien rédacteur en chef de La Tribune, Yan de Kerorguen est actuellement rédacteur en chef du site Place-Publique.fr et chroniqueur économique au magazine The Good Life. Il est auteur d’une quinzaine d’ouvrages de prospective citoyenne et co-fondateur de Initiatives Citoyens en Europe (ICE).

Catégorie(s)

ETUDE, Le Magazine

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