Les changements dans nos vies venant de la technologie sont de plus en plus rapides. Et d’ici 2020, cette tendance va continuer avec , chaque fois, des avancées plus surprenantes. A quoi faut –il s’attendre ?

L’année 2010 et les suivantes vont être marquées par une dictature accrue du temps réel , souligne Pete Cashmore, observateur averti des médias sociaux, fondateur du site « Mashable », s’exprimant sur le site de prospective « Shapping for tomorrow », « on demande toujours plus d’immédiateté dans les échanges , ce qui devient addictif, engageant. On ancre le sens de la vie dans l’immédiat avec des technologies désormais accessibles partout à commencer par le smart phone ». Et les services qui vont avec comme Google Wave, qui permettent de lire une critique sur un restaurant avant d’en franchir la porte ou de faire connaître son avis à peine le dernier morceau avalé, ou de combler un trou de mémoire sur une citation ou le titre d’une chanson en quelques secondes, où que l’on se trouve.

Dictature du temps réel et localisation tout azimut

Il en résulte une sorte de « grande excitation » selon Pete Cashmore mais aussi « une grande confusion » compte tenu de ces sollicitations permanentes, que tour à tour on suscite ou qu’on génère. A cela il faut ajouter que la possibilité d’ être localisé en permanence grâce notamment aux téléphones intelligents dotés de système GPS ou autres.
Ainsi Foursquare, Gowalla, Brightkite et Google Latitude proposent divers services; histoire de savoir où se trouvent vos amis dans la ville, en train de se balader ou de boire un café.

Cette façon de se laisser ou faire localiser et de partager en temps réel tout, devient une nouvelle loi du comportement et des relations sociales qui marque profondément notre société. D’ailleurs, c’est le réseau social – faut- il rappeler que Facebook né il y a à peine six ans au sein des étudiants d’Harvard, compte quelque 350 millions d’utilisateurs- qui pourrait de plus en plus intervenir pour aider certains d’entre nous à gérer et trier cette abondance d’informations , à travers des services comme Google’s Social Search.

Paradoxalement, si le réseau social sert de filtre pour s’informer, il faudra en même temps gérer subtilement son exposition publique en naviguant entre marketing personnel et perte de vie privée. « Car ce partage à grande échelle, d’amis, de goûts, de localisation, entraine par force une érosion de la sphère privée » conclut Pete Cashmore.

Un peu de réalité augmentée pour pimenter le tout

Les contours même de la sphère privée seront sans doute bousculés par la progression insidieuse de la virtualité et de la réalité augmentée. D’ici quelques années, en marchant dans les rues s’afficheront devant nos yeux, au fur à mesure qu’on croise des boutiques des informations sur leurs promotions, sur les marques…Layar qui se définit comme le navigateur de la réalité augmentée mobile propose déjà de pointer son téléphone sur le chantier du futur centre commercial de Rotterdam qui ouvrira en 2014, pour s’y promener !

Ainsi plusieurs lignes forces se dégagent à horizon de la prochaine décennie, à commencer par « une croissance exponentielle du pouvoir de la technologie de l’information qui va irradier tous les domaines de notre vie courante » selon Ray Kurzweil (1) scientifique, inventeur, spécialiste de l’extension de la durée de vie, futurologue… Il souligne dans un article récent du NY DailyNews que « nous serons tous bioniques d’ici 10 ans » .

La Singularité – concept qu’il prône- suppose qu’ à partir d’un point de son évolution technologique, la civilisation humaine connaitra une croissance technologique d’un ordre supérieur, de telle façon que le progrès ne serait plus l’œuvre que d’Intelligences artificielles, induisant de tels changements que l’Homme d’aujourd’hui ne peut les appréhender vraiment.

De plus en plus petites, ces technologies seront partie intégrantes de nos vêtements, de notre corps. Le téléphone intelligent n’est qu’une étape, on se passera à l’avenir de petit écran, les images viendront en direct dans nos rétines. Nous vivrons dans un environnement virtuel à trois dimensions pour voir ou lire films et livres,ou participer à des réunions.

Un corps et une santé régénérés

Dans le domaine de la santé et de la médecine, même chose. La connaissance de nos gênes – ce que Kurzweil appelle le « software de nos vies »- progresse chaque jour et il y a selon lui moyens de l’améliorer.
« On fait bien régulièrement des mises à jour du software de notre ordinateur ? Pourquoi continuer à se déplacer avec un software obsolète dans nos corps… » s’interroge t-il.

Le Human Genome Project, qui recense le génome humain sous toutes ses formes laisse entrevoir de grandes avancées dans ce domaine alors que les données doublent chaque année, et que le coût est divisé par deux : “pour 2020, nous aurons les moyens de programmer notre biologie de façon a éloigner les maladies et le vieillissement, de façon à traiter les pathologies cardiaques ou le cancer , ou encore à maitriser les mécanismes de l’obésité » poursuit Ray Kurzweil.

La biologie, avec les récents progrès dans le décryptage du génome, est devenue en quelque sorte une nouvelle « technologie de l’information ». D’ici quelques années, il sera possible de faire du « reverse engineering », de reprogrammer certains de nos gênes. Et Kurzweil de citer quelques autres outils comme la « smart dust » (quasi invisible, bourrée de puces électroniques communiquant entre elles par des liaisons sans fil) , les « nano assemblers » , les « respirocytes » ( nanobots ou nanorobots qui fonctionneront comme une cellule sanguine, circulant à l’intérieur de notre corps pour protéger notre santé de l’intérieur), les « foglets » ( nanobots qui se rassemblent pour former n’importe quel objet, ou remplacer des fonctions thérapeutiques) . Un vaste programme à suivre pour les dix ou vingt ans à venir.

(1) auteur notamment de “The Singularity is Near” ,“The Age of Spiritual Machine” et « Nine Steps to Living Well Forever »

 photo: Institut de technologie de Tokyo. Galerie de d’n’c. Creative commons

Au sujet de Estelle Leroy

Estelle Leroy-Debiasi est journaliste professionnelle, Diplômée en Economie, ex rédactrice en chef du quotidien économique La Tribune. Elle contribue régulièrement au site ElCorreo, site de la diaspora latinoamericaine.

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Le Magazine, Sciences et société

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