Copenhague, nous y sommes. Une page majeure pour l‘avenir de la planète est en train d’être écrite au Sommet des Nations Unies sur le climat, avec à la clé un choix crucial pour le futur: soit un changement de cap vers plus de clarté, soit la perspective de temps obscurs ?

Force est de le constater, le temps n’est pas au beau fixe sous le ciel de Copenhague. Bien avant la conférence des Nations Unies, les médias traditionnels ont déjà donné la couleur du bulletin météo : des nuages sombres couvriront le Sommet. Cette prévision pessimiste a été donnée par le Premier ministre danois Lars Loeekke Rasmussen lors du Forum de l’Organisation de coopération économique Asie-Pacifique (Apec). Ce dernier ne croit pas en l’adoption, dans un premier temps, d’un accord juridiquement contraignant.

Un accord énergie-climat, sans engagements précis, serait sans doute mieux que rien.

Mais la situation de la planète à l’horizon 2020 peut-elle se contenter d’un compromis à minima? Même si cette option semble la plus proche du possible pour obtenir un compromis le moins mauvais possible, un devoir s’impose : être ambitieux.

Il est encore possible d’obtenir un accord juste, de rester en dessous du seuil des 2°C de réchauffement climatique, pensent les écologistes. Seul un accord juridiquement cadré permettrait de créer un environnement juridique propice à une gouvernance écologique sérieuse et de s’engager dans la construction d’un mode de développement soutenable, conviennent les acteurs de la société civile et les ONG.

« Si nous n’agissons pas maintenant, ils seront sans aucun doute encore plus dévastateurs ». C’est le constat sans appel de 2 500 scientifiques du monde entier qui ont reçu collectivement le Prix Nobel de la Paix en 2007 pour leurs travaux sur le phénomène des changements climatiques.

Soyons optimistes. Les pays d’Afrique et quelques petits états déjà victimes du réchauffement climatique continuent de faire pression auprès de nos dirigeants politiques pour qu’un tel accord soit adopté.

Les pays émergents comme le Brésil, la Chine et les pays en développement réalisent qu’ils seront les premiers à souffrir des impacts du changement climatique et qu’ils doivent absolument réduire eux-mêmes leurs émissions. La Chine est d’ailleurs devenue un des leaders des énergies renouvelables. Le Brésil s’est engagé à réduire de 70% le taux de déforestation de l’Amazonie, sa principale source d’émissions de gaz à effet de serre. De même l’Indonésie et l’Afrique du Sud vont dans ce sens. Des pays riches comme l’Australie, la Norvège ou le Japon ont pris des engagements de réduction d’émissions à la hauteur de leur responsabilité. La France a introduit la taxe carbone. Quant aux Etats-Unis, sans doute faut-il miser sur les petits progrès. Pas facile de solder d’un coup des années d’impéritie écologique.

Les Américains produisent aujourd’hui un quart des émissions mondiales de gaz à effet de serre (GES). Mais Barack Obama s’est engagé à réduire de 80% les GES aux Etats-Unis d’ici 2050, par rapport aux niveaux de 1990. Un plan d’investissement de 150 milliards de dollars a été lancé en faveur des « Clean Techs » pour lutter contre le réchauffement climatique. En signe de confirmation de son engagement, Barack Obama a nommé secrétaire à l’Energie le prix Nobel de physique Steven Chu, un partisan convaincu de la recherche d’énergies renouvelables et alternatives. Ce n’est pas rien.

Tous comptes faits, on peut y croire, les ingrédients sont réunis pour un accord sérieux. A la société civile d’exercer son rôle de vigilence et de manifester sa présence.

L’organisation mondiale de protection de l’environnement (WWF) a récemment énuméré les conditions à réunir pour que le Sommet de Copenhague soit un succès à la hauteur des enjeux de la Planète et des attentes de l’Humanité.

Les gouvernements doivent se mettent d’accord sur un nouveau Protocole de Copenhague contre le réchauffement climatique en remplacement au protocole de Kyoto qui s’achève fin 2012, souligne le WWF. Cet accord doit garantir la survie des différents pays, cultures et écosystèmes, et trace la voie vers une économie sobre en carbone. Pour enrayer le réchauffement mondial bien en dessous du seuil dangereux des deux degrés, et stabiliser celui-ci en dessous de 1,5°C sur le long terme, les émissions mondiales de CO2 doivent atteindre leur pic avant 2017. Les pays industrialisés doivent donc s’engager à réduire leurs émissions de 40% d’ici 2020 par rapport aux niveaux de 1990. Rappelons qu’à la conférence de Poznan qui s’est tenue il y a un an, les 27 pays de l’Union européenne ont adopté un plan de lutte contre le réchauffement climatique des  » trois 20  » : 20 % de réduction des émissions de Gaz à effet de serre (GES) par rapport à 1990, 20 % d’énergies renouvelables dans la consommation totale et 20 % d’économies d’énergie à l’horizon 2020.

Autre ingrédient du succès : faire une offre chiffrée et juste de soutien aux pays du Sud. Le WWF évalue à au moins 30 milliards d’euros par an cette aide en plus de l’aide conventionnelle. En outre, les pays industrialisés doivent s’engager à modifier radicalement leurs façons de produire et de consommer. La contribution de l’UE devrait être comprise entre 2 et 15 milliards d’euros par an d’ici à 2020. Soit au total 100 milliards d’euros de financement pour permettre à des milliards de personnes de faire face au défi climatique. Somme toute, ce n’est qu’une petite partie de ce que les pays riches ont réuni pour endiguer leur crise financière. Un cadre pour des actions d’adaptation immédiates doit être mis en place, en particulier pour les pays et écosystèmes vulnérables. Coût 160 milliards

Plus généralement, Copenhague fournit l’occasion de remettre en cause les dogmes de l’hypercroissance, de la compétition effrénée, de l’économie telle qu’elle a fonctionné jusqu’à présent. L’espoir, à Copenhague, portera aussi sur la création, au niveau international, d’un organisme de contrôle permettant de suivre l’évolution des différents pays vers leurs futurs objectifs chiffrés et de contrôler la tenue de leurs engagements.

Le plus inquiétant serait que le Sommet se transforme en opération de communication à l’usage de décideurs politiques toujours prêts à s’autosatisfaire ou à rejeter la faute sur les autres. Derrière les mots, il faudra décrypter.

Au sujet de Yan de Kerorguen

Ethnologue de formation et ancien rédacteur en chef de La Tribune, Yan de Kerorguen est actuellement rédacteur en chef du site Place-Publique.fr et chroniqueur économique au magazine The Good Life. Il est auteur d’une quinzaine d’ouvrages de prospective citoyenne et co-fondateur de Initiatives Citoyens en Europe (ICE).

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